Depuis une semaine, Richard Boni Ouorou fait l’objet de vives critiques et d’une campagne de dénigrement sur les médias sociaux et dans certains milieux politiques. En cause, Sa dernière tournée au nord du Bénin et ses déclarations dans une interview accordée à Dabaru qui ont amené certaines personnes à l’estampiller comme une nouvelle recrue du pouvoir. Dans un entretien à bâtons rompus accordé à notre rédaction, il revient sur les raisons et les conditions de cette descente sur sa terre natale mais aussi sur certaines de ces déclarations.
C’est dans sa villa située à Baguida- banlieue est de Lomé- aux encablures de l’océan Atlantique qu’il nous reçoit avec beaucoup d’humour et de courtoisie. Les critiques et les accusations de ces derniers jours n’ont guère entamé le moral de l’homme qui se dit un peu déçu par certaines réactions mais ne renonce à rien dans son projet politique. Aussi multiplie-t-il des entretiens avec des militants et responsables de son organisation politique naissante. Richard Boni Ouorou nous reçoit après une série d’entretiens dans un bureau qui jouxte le vaste séjour où défilent chaque jour militants, parents et courtiers politiques venus du Bénin. Sans langue de bois, il aborde avec nous les questions dérangeantes et même les accusations du moment. Quelles étaient les motivations de ce voyage plein de mystères ? A-t-il été sollicité par le pouvoir pour aller fragiliser l’opposition au nord ? En réponse, il lève ses deux mains au ciel, jure n’avoir reçu aucune instruction politique d’aucun responsable, ni n’être dans aucun projet politique malsain. «Je te jure que ce voyage est une initiative personnelle et est motivé par des intérêts familiaux. J’étais fatigué de ne pas pouvoir rendre hommage à ma mère. Cela pesait énormément sur ma conscience », précise le politologue qui n’avait pu assister aux obsèques de sa mère à cause de ses prises de position politique de l’époque. Sa mère fut enterrée au cimetière de Somè en 2019 sans qu’il n’ait jamais pu se prosterner sur sa tombe. Il voulait saisir l’occasion d’aller lui rendre hommage, advienne que pourra. C’est donc l’occasion pour lui d’aller sur sa tombe et de prier pour elle. Mais comment rentrer sur le territoire national sans subir les représailles du pouvoir ? Richard Boni Ourou affirme avoir peaufiné avec son fils sa stratégie qui a semblé marcher. Selon ses propos, il a tout fait pour garder le secret autour du projet. « Le seul, en dehors de moi, qui avait connaissance de ce déplacement c’est mon fils », confie-t-il. Il fallait en plus toute une stratégie afin de ne pas alerter le maximum de personnes et de provoquer des successibilités politiques. « J’ai donc mis en valeur ma nationalité canadienne. Je me suis comporté comme un canadien qui rentrait au Bénin car j’étais conscient qu’au moindre grabuge, les autorités canadiennes allaient me venir en aide. J’ai donc pris un e visa d’entrée au Bénin puis après, poussant l’outrecuidance plus loin, je fais une réservation à Novotel Orisha(sourires) », explique-t-il. Et pourquoi ce choix ? « Parfois, il est efficace de confier l’enfant victime de sorcellerie au sorcier même », ironise-t-il en me montrant à partir de son iphone sa facture d’hôtel mais aussi son visa. Après le défi d’entrer sur le territoire et d’aller sur la tombe de sa mère, il décide d’oser un peu plus. « J’ai alors pris la décision d’aller à Banikoara où j’avais financé quelques activités caritatives et des projets de développement communautaire. Le voyage a été organisé avec un comité restreint de membres de mon staff. Et la stratégie est d’informer le minimum de personnes en donner les vraies informations à la dernière minute », informe le politologue. Mais alors, comment a-t-il pu accorder l’interview à Dabaru ? Richard Boni Ouorou raconte que c’est sur le chemin de Banikoara qu’il décide de marquer une pause à Parakou pour saluer le roi mais aussi pour manger quelque chose. « C’est là où je devrais manger que j’ai croisé mon frère Barnabas qui m’invite à visiter ses studios. Je n’ai pas pu refuser, tant sa pression était forte. Mais derrière cette invitation, il avait organisé sa surprise. C’est au siège de Dabaru qu’il me contraint à lui accorder une interview », complète le leader du Libéral. C’est donc à coup par coup, de manière improvisée que ce voyage de six jours a été organisé. « J’ai fait Cotonou, Porto Novo, Parakou, Banikoara, Kandi, Parakou, Djougou, Dassa et Cotonou. Partout où je suis passé, les populations se sont mobilisées pour m’accueillir. J’ai pu rencontrer des rois, des militants de mon mouvement et j’ai pu mesurer l’ampleur des besoins sociaux », me confie-t-il.
Otage
Déçu mais pas atteint par les accusations, il se défend de n’avoir jamais voulu nier ses collaborations antérieures et soutiens au Président Yayi, à Joël Aïvo et Reckya Madougou. « Lorsque j’ai dit que je ne les connais pas c’est simplement pour dire que je ne les ai jamais vus. Pourtant j’ai soutenu chacun d’eux dans les déboires qu’ils ont connus. C’est en voulant me discréditer que mes propos ont été sortis de leur contexte », se désole M. Ouorou qui accuse les activistes du parti Les Démocrates : « On connaît celui qui a diffusé le premier les vidéos de sabotage. C’est un activiste du parti bien connu comme tel ». Le bénino-canadien dit n’y avoir rien regretté puisque cette campagne a accru sa popularité. « Ils m’ont fait du bien en voulant me diaboliser. En quelques jours, mon audience a connu un grand boom et j’ai reçu des centaines de message de soutien et de félicitations ». Selon lui, si le camp de ses détracteurs s’est agrandi c’est parce que beaucoup comptaient jouer aux intermédiaires et négocier pour lui lorsqu’il va vouloir rentrer au pays. « La manière dont j’ai géré les choses les ont surpris et chacun a supposé que s’il n’a pas été associé c’est sûrement que j’ai bénéficié de soutien au haut niveau », explique le politologue. « Je ne veux pas être l’otage d’une ambition politique et je n’ai pas une décision formelle pour 2026. L’essentiel pour moi c’est de continuer à être le serviteur de mon peuple et à contribuer à l’éveil des consciences. Si des gens croient que je vais les ménager en dépit de leurs incohérences parce que j’aurai besoin d’eux demain, ils se trompent sur ma personne », avertira-t-il.