La proposition de la révision de la constitution béninoise sur la table de la représentation nationale fait courir la classe politique béninoise. Pendant que les uns courent à la recherche des voix nécessaires pour faire passer le projet, les autres courent et se cachent pour ne pas se faire rattraper par les révisionnistes qui ont lancé une grande chasse aux voix manquantes pour retoucher, pour la deuxième fois en, à peine 5 ans, la constitution de 1990.
Ce jeudi 06 Novembre 2025, les députés se pencheront en plénière sur l’étude et le vote de la proposition de la loi portant modification de la Constitution béninoise. Cette opération a été déjà tenue en échec par le parti Les Démocrates qui détenait à l’Assemblée nationale la minorité de blocage pour empêcher la révision de la constitution. A l’occasion, le groupe parlementaire présidé par l’honorable Nourénou Atchadé avait la minorité de blocage qui, aujourd’hui , n’existe plus avec la démission de six députés du groupe ramenant de 28 à 22, le nombre des élus démocrates. Le départ de Constant Nahum, Michel Sodjinou, Denise Hounmenou, Chantal Adjovi, Joël Godonou et Léansou Do Rego, a permis à la mouvance d’obtenir la recevabilité de la proposition de loi qui devra passer par le deuxième filtre, celui de l’adoption par la représentation nationale. Seulement, il manque une voix malgré le départ des six députés Démocrates qui, probablement, pourraient voter pour la révision ce jeudi. Selon la Constitution, elle-même, il faut les 4/5 des députés pour la réviser sans aller au référendum. Ce qui équivaut à 88 députés. Les deux groupes de la majorité parlementaire à savoir le BR et l’Up-r comptent 81 députés. Lorsqu’on ajoute les 06 démissionnaires des LD, cela donne 87 qui est inférieur aux 88 recherchés. Il faut donc un député supplémentaire pour permettre à la mouvance de faire aboutir son projet. Ne voulant pas se permettre un nouvel échec après celui de 2024, la rupture fait feu de tout bois pour débaucher au moins la dernière voix manquante, d’où la chasse grandeur nature lancée aux députés LD qui ne veulent pas se laisser avoir.
De sources bien informées, c’est un défi pour la mouvance de faire aboutir ce projet pour lequel elle négocie, traque et menace des élus qui ne dorment plus ni des deux oreilles, ni des deux yeux. « J’ai peur pour ma vie et pour la vie de ma famille. Quand mon téléphone sonne, le battement de mon cœur s’accélère. Lorsque mes collaborateurs m’annoncent un visiteur, j’ai envie de sauter par-dessus la clôture, parce que je subis trop de pression. Je reçois autant d’appels que d’émissaires afin que je puisse suivre les collègues qui ont démissionné. Mais je n’ai pas été éduqué ainsi », confie un élu démocrate qui martèle qu’il n’est pas seul à être pourchassé depuis des jours juste pour qu’ils puissent tourner le dos à leur formation politique. «J’ai voté contre la révision de cette constitution en 2024, je ne vois pas pourquoi je voterai pour cette année alors qu’il n’y a rien de bon pour le peuple béninois dans cette proposition de loi. Je ne démissionnerai pas des LD et je ne voterai pas cette révision », confesse un autre élu démocrate qui révèle qu’il y a parmi ses collègues députés de la mouvance présidentielle qui vivent le même calvaire parce qu’ils sont soupçonnés de vouloir s’opposer également à ce projet de révision constitutionnelle. Après sa dernière rencontre en date avec le Président Patrice Talon, l’ancien président Boni Yayi, président du parti Les Démocrates a déclaré que : « Il se déroule en ce moment, un vaste plan de déstabilisation d’un certain nombre de hauts responsables et de députés du Parti : Les Démocrates au profit de la mouvance sur une base d’intimidations, de promesses d’incitations financières et de menaces de tous genres. Ce plan qui se déroule en ce moment où je m’adresse à vous prend malheureusement l’allure d’un élan mettant à mal notre unité nationale ». La grande chasse aux députés démocrates pourrait donc être la concrétisation du plan dévoilé par le docteur Boni Yayi car c’est bien après cette rencontre et les révélations de l’ancien Président que les démissions au sein des LD se sont enchaînées.
Depuis que la proposition de la loi modificative de la constitution a atterri sur la table des députés, plusieurs voix se sont déjà levées pour non seulement condamner et rejeter le projet, mais aussi et surtout inviter les députés au rejet de la révision.
Norbert Adjakoun