Le 27 juin passé, 405 militants du parti Union Progressiste le Renouveau(UP-R) ont décidé de rompre les amarres avec ce parti. Il s’agit d’un évènement politique singulier dans le landerneau politique. Singulier par le nombre de militants qui démissionnent et par la position actuelle du parti. C’est l’une des rares fois si ce n’est la première depuis 1990 qu’autant de militants, dans une démarche solidaire et avec autant de détermination, décident de quitter un parti. On les a vus, lettre de démission en mains, assis sous le soleil- la réception du siège du parti à Porto Novo ne leur a fait aucune faveur- attendant impatients de déposer leurs démissions. Le parti a été même surpris par leur détermination qu’il a fini par stopper l’enregistrement des démissions pour ainsi dire, mettre fin à cette humiliation. Et lorsqu’ils ont réussi à le faire, ils sont venus se gausser du parti qu’ils ont lâché devant micros et caméras comme s’ils venaient de jeter le froc aux orties : une sorte de bon débarras pour un parti qui les encombrait. Et leurs discours le prouvent à suffisance. L’un d’eux l’a exprimé de la plus belle manière en langue tori : « après avoir couru fatigués, nous n’avons plus d’issue. Le baobab a perdu totalement ses feuilles et les rayons de soleil ont commencé à nous brûler. Et là, nous avons décidé de quitter sous cet arbre qui ne nous donne plus d’ombre ». Le message est clair. Un autre stigmatise le fonctionnement du parti en affirmant que « les dirigeants prennent en catimini des arrêtés et les imposent aux militants et plus grave que la misère s’est accentuée. Une dame, visiblement septuagénaire, affirme avoir trop travaillé pour l’UPR et qu’il est temps de se retirer. Les différentes déclarations des militants affranchis révèlent deux problèmes de gouvernance : celle du pays et celle du parti. La première a engendré la misère et accru les inégalités, la seconde quant à elle a dévalorisé le militantisme politique et favorisé la dictature de l’élite sur les militants.
Mais ce qui rend cet évènement intéressant c’est le fait de voir des militants d’un parti au pouvoir, je dirai un parti-pouvoir se vider de militants alors qu’il a encore la manette du pays en main. Et ça, on ne le dira jamais assez. C’est l’une des rares fois qu’on voit des militants quitter un parti au pouvoir pour rejoindre, nous souffle-t-on, l’opposition. Dans nos pays où la démocratie est encore embryonnaire, l’appartenance à la majorité au pouvoir est une opportunité, un bonheur alors que l’opposition est considérée comme la misère. Beaucoup d’hommes politiques ont caricaturé cela par la rivière où les animaux vont aller se désaltérer. C’est dire qu’on est habitué beaucoup plus à voir le mouvement inverse avec des militants qui quittent l’opposition pour aller vers la mouvance. Cette démission en cascades n’est que l’expression du grand désespoir qui gagne le pays ; beaucoup plus de la faillite politique d’un parti qui contrôle presque la totalité de l’appareil d’Etat et qui n’arrive pas, hélas, à susciter l’espoir et rassurer les Béninois pour le futur et ceci. Il est la meilleure contradiction à la politique néolibérale et la proclamation du bonheur des Béninois par les partisans de Patrice Talon.