Les syndicats ont marché ce samedi 11 mai 2024. Ce, avec la complicité béate des Forces de Sécurité et de Défense (FDS) du Bénin. La marche a duré pendant plus d’une heure et a démarré à la Bourse du travail pour s’acheminer sur l’estrade de l’étoile rouge de Cotonou où a germé un flot de discours anti cherté de la vie et de violation flagrante du droit syndical.
L’énergie n’a pas été ce qui a manqué à cette marche. Encore moins les slogans. Jusqu’au bout, ils auront tenu fermes face à la férocité du soleil qui commençait déjà à projeter ses rayons ultraviolets sur l’asphalte aux environs de 09h 45 minutes, pendant que la marche s’acheminait vers la place de l’étoile rouge. Depuis 7 heures en effet, ils ont été nombreux à répondre à l’appel des centrales confédérales à savoir la CSA-BENIN, la CGTB, l’UNSTB et la COSI-BENIN. Armés de banderoles rouges et de gilets verts, ils voulaient absolument passer leurs messages. L’enceinte de la bourse du travail n’était pas remplie dès les premiers instants. Ce qui laissait percevoir sans doute, selon Euloge LEZINME, troisième secrétaire général adjoint de la CGTB, que les arrestations intervenues le 01 mai, à l’occasion de la marche organisée en marge à la fête du travail, avaient fortement émoussé certains ardeurs. Mais il en fallait davantage pour décourager la meute, rengaine Euloge. «Nous, c’est le message. Ce n’est pas toute la ville de Cotonou ou tout le Bénin qu’on voudrait mobiliser. Même si on est 10, on va passer le message pour les travailleurs », a-t-il rassuré.
Le message sera finalement passé au bout d’énormes efforts physiques. Avec l’appui et le soutien magistral des éléments de la police républicaine, stationnée le long de chaque point stratégique devant mener à la destination finale. À chaque rond-point les conducteurs de taxi-moto grossissaient la troupe en rejoignant les manifestants, scandant à tue tête : «On a faim… Talon au secours», pancartes en mains. Dans le même temps, une dame, sortie de nulle part, se débarrassa, d’un geste rapide, de son pagne, laissant entrevoir son collant noir, pour lancer le «Trop c’est trop» instigateur ; symbole de son ras-le-bol. «Nous les femmes du marché nous souffrons beaucoup trop», a-t-elle laisser entendre.
10 Heures 15 minutes. Place aux discours officiels. Prenant la parole sur l’estrade de la place de l’étoile rouge, l’ex secrétaire général de la CSA-Benin, Noël chadaré a salué la ténacité des manifestants avant de rappeler l’objectif de cette marche du 11 mai. «La marche de ce jour, commence-t-il, est l’œuvre de la victoire des travailleurs. C’est le triomphe du bon sens. Parce qu’on ne peut pas empêcher des gens qui ont quelque chose à dire de l’exprimer. C’est la démocratie. Et ce que nous faisons, le pouvoir actuel doit comprendre que ce n’est pas un acte de défiance. On n’est pas contre sa personne. Mais on veut dire ce qu’on ressent. Et c’est une marche pour aider le pouvoir à décrypter les sillons que nous lui envoyons. On a faim. On a pas de casque, on nous persécute, nous pourchasse comme des malfrats. On n’est pas d’accord avec ça. Le maïs est cher. Les gens souffrent, ils ne mangent pas. C’est donc des sillons qu’on envoie pour dire il faut faire quelque chose. » Selon Noël chadaré, en disant tout cela, «le pouvoir doit comprendre que c’est pour l’aider. Et en l’aidant, il décrypte les signaux et il analyse ce que nous sommes en train de dire et il ouvre le dialogue avec les travailleurs». Ce que veut le peuple conclut-il, c’est juste de «l’eau et du pain». Toute chose qui, selon le syndicaliste, manque cruellement au peuple beninois, en tout cas à l’heure actuelle.
À noter qu’à la suite du mot de l’ex SG du CSA-BENIN, plusieurs autres allocutions ont succédé. Il s’agit de celles du SG de l’UNSTB, la CGTB et bien d’autres. Dans leurs messages, ces organisations de défense des droits des travailleurs ont aussi passé le message de la vie chère au Bénin, des brimades du régime en place, des déguerpissements tous azimuts et du non respect des libertés syndicales. Le clou de la marche de ce samedi 11 mai à été le message de l’organisation régionale africaine de la Confédération Syndicale Internationale (CSI-Afrique) appellant, dans sa note, lue par sa représentante, Aubierge Agbozognigbe, le président Patrice Talon a procédé à la libération inconditionnelle des travailleurs-manifestants du 1er mai et à l’ouverture ad hoc d’un dialogue social.
Déjà ils ont annoncé un dialogue avec le chef de l’État le 23 mai prochain.
Ignace TOSSOU