Se faire relire son texte est pour nombre de journalistes, principalement ceux de la presse écrite, un réflexe encré depuis des temps immémoriaux, dans la pratique du métier du journalisme. Si cette manière de faire vise à avoir une production exempte de coquilles, elle ambitionne surtout de polir son œuvre, autant que se peut, comme le préconise d’ailleurs l’écrivain français, Nicolas Boileau. Mais force est de constater qu’avec l’avènement des nouvelles technologies, la pratique semble être volée, d’un coup, en éclats.
Aujourd’hui, on ne se sent plus forcément obliger de passer son article au tamis. En tout cas, pas à la manière de l’antiquité. Celle qui impose au journaliste le devoir de conscience de faire relire son article par l’un de ses confrères, le secrétaire de rédaction ou encore le rédacteur en chef. Ce temps semble être révolu. Du moins depuis que les nouvelles technologies sont apparues dans les habitudes humaines, faisant ainsi naitre, le cyber journalisme ou le journalisme web. Rares sont aujourd’hui les journalistes qui se laissent relire par leurs confrères. Preuve de la manifestation de l’égo de soi ou l’expression d’un manque d’ouverture d’esprit ? Le dire de la sorte, c’est aller trop vite en besogne. A y voit de près, le contexte s’y prête.
En effet, si avant, les hommes de presse ont pris l’habitude de rédiger des textes à main levée, aujourd’hui, les ordinateurs ont pris le pas. Ces outils intelligents ont vu leur capacité d’adaptation humaine booster d’un cran, avec l’intelligence artificielle qui permet de rédiger des textes exempts de fautes grâce à des outils de correction. De telles sortes qu’il n’y a qu’à finir de rédiger son texte et de le plaquer en un clic dans la marge des sites de correction reconnus en la matière puis le résultat est visible : une transformation radicale du texte tant sur le plan grammatical que syntaxique. Le choix de cette option s’observe beaucoup plus avec les jeunes journalistes, souvent à l’affût des transformations numériques, que ceux appartenant à une certaine catégorie donnée.
Ignace Natonnagnon est journaliste au quotidien La Priorité. Se faire relire est pour lui, la manière la plus efficace d’ « éviter de laisser des fautes et certaines incohérences dans (ses) articles ». Selon lui, parfois, on a beau relu son papier, il y a de ces coquilles qu’on n’arrive pas à déceler aussi facilement. Or, « ce n’est pas bien que des fautes émaillent nos productions. Les articles voyagent beaucoup et nous n’avons pas souvent une idée du nombre de personnes qui nous lisent ». Et pour se faire, la cible du rédacteur en chef du quotidien béninois est bien définie.
Généralement, « ce sont des confrères de la rédaction qui m’aident ». Par ailleurs, le choix « des personnes qui ont un bon niveau en français tels que les enseignants du secondaire », est aussi envisageable. « Certains confrères ne sont pas ouverts pour se faire lire avant publication de leurs articles mais moi, ça ne me gêne pas. Même aux stagiaires, je remets parfois des articles pour qu’ils m’aident. Je ne sais pas si c’est l’humilité mais ce réflexe, je l’ai appris depuis l’université avec un enseignant avec qui j’ai collaboré sur des articles scientifiques », explique le professionnel des médias qui confie par la même occasion n’avoir pas encore expérimenté l’option des outils numériques de correction. Wenceslas Akakpo lui, par contre, en a déjà fait l’expérience. D’ailleurs le journaliste web est à cheval entre deux options : «Je me fais relire généralement puisque ça m’arrive de commettre, à mon insu, des fautes d’inattention. Mais parfois, à défaut de demander l’aide d’un confrère, je fais recours à internet pour faire les corrections nécessaires ; c’est plus rapide.»
Il convient donc de retenir que se faire relire de quelqu’un, avant publication de son article, relève de soi, des expériences ainsi que des pratiques régulières de chaque journaliste. L’essentiel serait que le texte du journaliste soit exempté de coquilles car les fautes répugnent, horripilent voire même défidélisent les lecteurs.
Ignace TOSSOU