Kènu est son nom d’artiste. Originaire de Bopa, il a commencé par s’intéresser à la musique depuis son plus jeune âge. Tel un oiseau migrateur, l’homme se définit par l’esprit du voyage. Sa musique, l’orijazz, une musique du Golfe du Bénin, trouve ses racines entre les traditions ivoiriennes et béninoises. Innovateur fin, Kènu étoffe sa musique au fur et mesure des nouvelles rencontres qu’il effectue. Son entourage est pour lui, une véritable source d’inspiration.
C’est un schème pour nombre d’artistes africains que de débuter leur carrière musicale dans une chorale religieuse. Christian Koffi Hounnouvi, de son nom à l’état civil, a suivi le même schéma. Des années durant, il a évolué du côté de la Côte-d’Ivoire avec le groupe de chorale religieux congolais, Louzolo Amour OPH. « C’est là que s’est révélé ma passion pour la musique ». D’abord en tant que claviériste puis animateur de la chorale. Très rapidement, Kènu a pris ses marques et va commencer par composer ses propres chansons. La première fois qu’il s’est produit sur scène, l’homme en a encore le souvenir tout frais. C’était en 2004, confie-t-il dans une interview exclusive à nous accorder. Dix ans après, 2014 plus précisément, Kènu sort son premier album de cinq titres intitulé : Xhèviosso. Il ne faut pas chercher loin. Dans ce contexte, Xhèviosso pour dire la foudre. Un mixage de son nom d’artiste avec ce nom de divinité dans la tradition béninoise (Kènu et le Xhèviosso), donne l’adage « Parle afin que résonne la foudre ». Et depuis que Kènu fait résonner la foudre au travers de sa muse, l’espoir d’un brassage interculturel est né. Son deuxième album, Jalavodo, qui signifie « redresse correctement ton pagne », sorti en décembre 2023 sonne comme une « invitation à faire resplendir la culture béninoise et puis généralement africaine et ces plus belles couleurs ».
Que ce soit en prestation live ou dans ces productions musicales, Kènu réclame un pan de son identité. En chantant en langue Bopa, « c’est pour montrer au monde une partie de tout un patrimoine qu’il ignore. Je chante de moins en moins en français, en espagnol en portugais parce que c’est quand même bien que de temps en temps, le public comprenne spontanément ce que l’artiste dit mais je fais le choix de chanter principalement dans ma langue maternelle », a expliqué l’enseignant d’espagnol.
Kènu est titulaire d’un doctorat en Espagnol, spécialité langue et littérature romane. Enseignant à l’université de Nantes, il met en valeur sa maitrise de la langue espagnole cumulativement à sa passion pour la musique. Pour lui et pour nombre de ses proches, l’univers de la musique et de l’enseignement forment un seul ensemble. « Au début je me disais comment ça va se passer puisque j’aime beaucoup la musique et j’aime beaucoup l’enseignement mais beaucoup de gens me disaient que tu verras, ce sont des professions qui sont assez proches et qu’il est possible d’exercer de façon conjointe. Effectivement, c’est ce qui commence à se passer. J’arrive à cumuler les deux casquettes, musicien et enseignant chercheur ».
« Je vis de mon art mais pas financièrement »
Pour Kènu, « la musique béninoise est immensément riche. Elle regorge de beaucoup de musiciens et d’artistes talentueux. » Mais le hic selon le natif de Bopa est que « moi j’ai l’impression que les artistes que met en avant le système de diffusion musicale ne sont pas forcément les artistes là que j’écoute », déplore-t-il.
A la question de savoir si Kènu vit de son art, la réponse est sans équivoque : « vivre de son art c’est beaucoup dire. C’est pour ça que j’ai souhaité garder un emploi un peu plus sûr que la musique… La musique c’est tellement aléatoire qu’espérer en vivre de façon décente, c’est un peu jouer à la loterie… Donc je vis de mon art mais pas financièrement », livre-t-il à bâton rompu.
FInAB 2024
Ce samedi, 27 avril 2024, Kènu et son groupe prestaient pour la première fois sur le podium du Festival International des Arts du Bénin (FInAB) qui est à sa deuxième édition. Ses impressions, sur cet évènement culturel d’envergure, sont plutôt bonnes. « C’est la première fois que je me produis sur la scène du FInAB avec mon groupe. C’était une superbe expérience. Une belle scène. Je pense que c’est l’un des évènements culturels majeurs de la scène béninoise. Il y a le Vodun days aussi. C’est vraiment un honneur pour nous d’avoir été accepté dans cet évènement ».
Kènu et son groupe d’orchestre sont actuellement en tournée internationale. Laquelle tournée, prolongée jusqu’en 2025, les mèneront dans nombre de pays africain et même européens à savoir la Côte-d’Ivoire, le Sénégal, le Maroc etc.
Ignace TOSSOU