Le jeudi 09 janvier passé, 28 soldats Béninois- selon les chiffres officiels- sont tombés les armes à la main sous les feux nourris des terroristes de la GNIM. Ceci est la plus lourde défaite infligée à l’armée Béninoise par ces impitoyables guerriers défenseurs d’une cause obscure et inexplicable. Toutes statistiques bien tenues, c’est aussi la plus lourde défaite de l’armée béninoise sur un théâtre depuis 1960, plus que l’agression militaire du 16 janvier 1977 conduite une horde de mercenaires internationaux conduits par le français Bob Denard.
Oura, ce petit village de la commune de Karimama aura été pilonné pendant des heures par ces agents du mal, les braves soldats béninois auront aussi résisté pendant autant d’heures avant de tomber un à un. Cette attaque aura réussi parfaitement pour l’ennemi qui s’en est sorti sans trop de pertes, emportant au passage un bon arsenal militaire utilisable pour les prochaines fois. L’armée béninoise est donc avertie.
Mais cette énième attaque, bien organisée et bien réussie par l’ennemi interpelle et amène à se poser des questions surtout que la position attaquée est la plus renforcée de l’armée béninoise depuis la mise en place de l’opération Mirador pour lutter contre le terrorisme dans le nord du Bénin.
Il est donc évident que bien des choses n’ont pas marché en dépit des efforts du gouvernement et de la détermination des éléments de l’armée dont on ne peut guère ignorer les sacrifices.
Je résume ici ces leçons en trois grands centres d’intérêt
La première leçon m’amène à dire que le gouvernement semble être bien seul dans le combat. Le faisceau d’éléments amène à avancer la thèse selon laquelle les populations n’ont pas pris le parti du gouvernement dans cette cause. Et pour cause, les opérations conduites par les terroristes avec une plus grande efficacité prouvent bien qu’ils bénéficient de renseignements fiables et de complicité de personnes vivant dans les zones concernées. Ils n’auraient pas pu réussir cette attaque s’ils n’avaient pas les bonnes informations sur leur ennemi. L’armée a malheureusement manqué de bonnes informations sinon elle aurait su que plusieurs colonnes de terroristes se préparaient à les attaquer de toutes parts. Et ce désamour entre l’armée et les populations est lui-même la résultante de nombreuses frustrations avec les communautés dont la plus connue est celle des chasseurs dénoncés, accusés, désarmés et non reconnus depuis les évènements politiques de mars 2019. Ceux qui connaissent le fonctionnement du dispositif de sécurité au nord ont conscience du rôle éminemment majeur joué par cette corporation dans la lutte contre l’insécurité dans cette région du pays.
La seconde leçon renforce la première et confirme la solitude de la stratégie gouvernementale de lutte contre le terrorisme dans un contexte où elle est condamnée à être globale, communautaire et surtout commune. Lorsque les terroristes sont attaqués et traqués au Niger et au Burkina, ils prennent la direction du Bénin où ils trouvent un refuge. Les bonnes relations diplomatiques entre le Bénin et le Niger et surtout le Burkina auraient pu nous aider à avoir auprès de nos partenaires des renseignements utiles pour se préparer à la riposte. Le nord du Togo avait subi les premières attaques terroristes au même moment que le Bénin mais il profite de ses bonnes relations avec Niamey et Ouagadougou. Aujourd’hui, le nord du Togo se pacifie progressivement grâce à la collaboration avec le Niger et le Burkina.
La dernière leçon c’est l’inefficacité de la stratégie du gouvernement. Comment peut-on croire que les soldats au front ont fait face à plusieurs d’attaque sans qu’aucun renfort en hélicoptère ne soit venu de Cotonou ou de Parakou pour leur prêter main forte ? Comment peut-on attaquer la position la plus renforcée de l’armée en plein jour et pendant plusieurs heures sans qu’il n’y ait ni du renfort, ni une riposte de taille ? Soit le commandement militaire était en fête à Ouidah et a banalisé l’attaque ou carrément les terroristes bénéficient de complicité au sein de la hiérarchie militaire. Le gouvernement a pourtant opté pour une communication à minima sur le sujet avec des mises en garde fréquentes à la presse de parler des sujets sécuritaires pourtant la situation ne fait que s’empirer.
Ces trois leçons devraient amener le gouvernement à rester plus perméable aux propositions et réflexions qui porteront sur des solutions globales, holistiques et surtout inclusives pour faire face à cette hydre dont on n’arrive pas malheureusement à couper les têtes.