Depuis les inquiétantes déclarations de David Koffi Aza, porte-parole du Comité des rites vodoun sur le Tofa 2025 et ses implications politiques sur l’élection présidentielle de 2026, les soupçons d’un 3è mandat du Président Talon refont surface. Et en dépit des nombreux démentis, les inquiétudes ne sont guère dissipées. Bien au contraire…
Alors qu’on la croyait totalement enterrée depuis la déclaration de Patrice Talon lui-même en 2024 et la révision de la constitution de 2019, l’idée d’un 3è mandat de l’actuel chef de l’Etat refait surface avec les dernières déclarations de David Koffi Aza. Le devin, officiant au nom du Comité des rites Vodoun en charge du Tofa, avait affirmé sans ambages, que l’oracle avait demandé de « maintenir à son poste l’actuel chef » et que toute tentative de le faire partir rendra la situation si difficile que « la main ne pourra plus prendre la pâte ». Il est allé plus loin en demandant aux députés de prendre leurs responsabilités. Depuis, les démentis se sont succédé sans trop changer la donne. Le premier démenti viendra des responsables du comité des rites vodoun qui, à travers un communiqué, se sont désolidarisés de leur porte- parole et de ses commentaires jugés « inappropriés ». Ce démenti n’a pas arrêté la psychose qui s’est emparée de maints Béninois. Et c’est d’ailleurs pourquoi le porte-parole du gouvernement est revenu sur le sujet. Au cours d’une conférence de presse animée vendredi 17 janvier dernier, Wilfried Léandre Houngbédji a affirmé que « Patrice Talon n’a aucune envie de prolonger son mandat ». Cette déclaration est la énième du même format faite par le porte-parole du gouvernement sur le même sujet. En 2023, en 2024, les mêmes rumeurs avaient contraint le même porte-parole à démentir tout projet d’orchestration du 3è mandat. Trois fois de suite, le sémillant communicant de Patrice Talon n’a pas réussi à convaincre ses compatriotes au regard du nombre de personnes qui continuent de nourrir ses doutes sur la sincérité de ses propos. Pour rappel, le 08 février 2024, Patrice Talon a affirmé lui-même ne pas envisager un 3è mandat. En l’intervalle d’un an, 3 démentis ont été faits sans que la rumeur ne semble guère s’estomper. Elle devient presque l’hydre de lerne qui ne meurt jamais et dont les têtes se repoussent quand on les coupe.
Les actes valent mieux que le discours
Les raisons de la persistance de cette folle rumeur sont à rechercher dans les actes posés par des personnes membres de la majorité présidentielle et l’attitude du chef de l’Etat. Comment peut-on croire à la bonne foi du chef de l’Etat alors que des personnes plus ou proches de lui annoncent ci et là leurs désirs de voir leur « chef » briguer un 3è mandat ? Comment peut-on croire aux promesses de Patrice Talon de quitter le pouvoir à la fin de son second quinquennat alors sa vice-présidente a appelé à la continuité de son pouvoir au-delà de 2026 ? Et ce cas n’est pas singulier, Bertin Koovi, membre du parti Bloc Républicain et communicant officieux du pouvoir a même lancé tout récemment sa dynamique pour la continuité du pouvoir de la rupture en appelant depuis des mois au 3è mandat de Talon. Jacques Migan, avant lui, avait tenu des propos similaires. Traîné devant la Cour Constitutionnelle pour avoir « violé » la constitution, il a bénéficié d’une belle promotion avec sa nomination comme Haut Commissaire de Lutte contre la Corruption(HCLC). Bertin Koovi n’a jamais été inquiété pour ses propos. Bien au contraire, il se la coule douce et roule carrosse en toute quiétude dans Cotonou. Un autre quidam à la denture clairsemée, officiant pour quel intérêt on ne sait, a exposé dans une théorie juridique diffusée en boucle sur les réseaux sociaux que Patrice Talon peut bien être candidat en 2026 car selon lui, depuis la révision constitutionnelle de 2019. Ni lui, ni Bertin Koovi, ni la vice-présidente Mariam Chabi Talata, ni Jacques Migan n’ont été, ni réprimandés, ou punis. Or, en mai 2018, deux jeunes acteurs de la société civile du Niger ont été placés sous mandat de dépôt par le tribunal de Zinder après une plainte du président Mahamadou Issifou. Quelques mois plus tôt, ils avaient appelé ce dernier à briguer un 3è mandat. Au Bénin, le président dont on connaît par ailleurs intransigeant sur certains sujets reste amorphe. » Qui ne dit mot consent », dit le proverbe.
Avec le temps, beaucoup de Béninois sont devenus dubitatifs sur la fin du mandat. En 2016 et 2017, Patrice Talon avait lui-même promis ne faire qu’un seul mandat à la tête du pays avant de changer d’avis en cours de route sans en donner les raisons jusqu’à ce jour. Les persécutions subies par des Béninois qui agitent leurs candidatures- ou dont on soupçonne de vouloir briguer la magistrature suprême- sont aussi d’autres éléments importants des craintes actuelles. Tous sont « Saint Thomas », craignant encore que le « boss » n’avise à nouveau.