Le 28 février 1990, la Conférence des Forces Vives de la Nation prenaient fin à l’hôtel PLM Alédjo de Cotonou. Aujourd’hui 28 février 2024, trente quatre ans jour pour jour après, nous vous faisons vivre cet évènement majeur de l’histoire politique du Bénin par la diffusion de l’intégralité du rapport général rédigé et lu par brillamment par le professeur Albert Tévoédjrè de regretté mémoire. Il rejette d’emblée l’influence et le pouvoir de l’argent, insiste sur le principe de la séparation entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire et invite au travail pour vaincre la fatalité.
1-« Vous vous attendez donc à ce que je vous dise dans ce rapport les piqûres d’épines ressenties, mais surtout les fleurs ensemble amassées. La première belle gerbe, c’est la Conférence Nationale elle-même. Nul ne pouvait y croire. Chacun de nous ici a émis, ou partagé ses doutes et ses craintes, et même sa certitude qu’il s’agissait d’un piège, un de ces nombreux pièges que les pouvoirs en difficulté imaginent facilement pour reprendre leur souffle et poursuivre leur emprise sur des Peuples asservis »
2-« Vous avez dit et je le rappelle : « L’argent ne peut plus être notre maître ». Tournant en effet le dos à notre histoire et notre géographie, à nos arts, à notre habileté, nous avons refusé notre croissance à partir de notre être et de nos ressources »
3-« L’argent devenu notre maître nous dicte toutes nos extravagances, toutes nos faiblesses, tous nos abus. A cause de l’argent qu’il nous faut à tout prix, nous nous mettons en danger de n’avoir plus de culture authentique, plus de liberté, plus de respect pour rien, plus de famille ».
4-« Vous avez dit Mesdames et Messieurs, et je le rappelle, le Pouvoir ne peut plus être confisqué par quelques-uns pour l’écrasement des autres. Oh certes toute société doit s’organiser autour de quelques idées fondamentales. Elle doit se donner des dirigeants pour le conduire et servir les intérêts généraux »
5-« Vous voulez que l’autorité soit recentré en son sens essentiel « Autoritas » prendre les autres en charge pour les faire grandir »
6-« Vous voulez un Etat de droit où le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire soient clairement séparés. Et voulez une presse libre et responsable. Vous voulez aussi que puissent s’exprimer et fleurir des mouvements associatifs, des coopératives dynamiques et productrices de biens. Vous voulez que les hommes et les femmes de ce pays aient le droit absolu et inaliénable à mettre l’intelligence au centre de leur vie. Et vous avez bien voulu retenir ce mot d’un philosophe contemporain : « Quand l’intelligence déserte le forum, la médiocrité s’installe et tout finit en dictature ».
7-« Pour que ce hiatus soit corrigé, il faut une chose première : un comportement différent des dirigeants face à l’argent. Il ne s’agit pas de dire : « j’ai des milliards » ; ceci a peu d’importance réelle dans ce pays. Par contre, un comportement de frugalité et de solidarité est un exemple que notre Peuple attend, un exemple qui aura à coup sûr un effet multiplicateur »
8-« Alors parce que nous avons juré de ne plus jamais humilier l’intelligence, parce que les chaînes sont brisées et que nous avons définitivement conquis le droit de parler au nom de l’Afrique, et des libertés fondamentales des hommes et des femmes de ce continent, parce que nous entrons désormais en partenaire majeur, dans un monde majeur, parce que la nuit s’est dissipée et que l’aube nouvelle rayonne. Au travail mes amis ! Nous avons vaincu la fatalité ».