Le Bénin dispose d’un hôpital international de haut standing. Si le projet rehausse à la fois l’image du Bénin et de son président Patrice Talon, il n’en demeure pas moins que la communication tapageuse qui l’a entouré ces derniers jours a embrouillé plus d’un. Elle semble avoir distillé plus de contre-vérités que de vérités.
Nul n’est resté insensible aux premières images du Centre Hospitalier International de Calavi(CHIC) diffusées en juin par le petit écran. Il présente une infrastructure hospitalière de dernière génération, avec des services de pointe et des spécialités très recherchées. Une fierté pour le Bénin qui voit son plateau technique rénové sur le plan médical. Seulement voilà, tout s’est passé dans ce dossier comme si l’on voulait parer Patrice Talon des plumes de paon. Ainsi donc, les préposés à la communication du palais ont salué le génie du chef de l’Etat et de son gouvernement à qui a été attribuée la paternité de ce projet. Le narratif gouvernemental n’a pas hélas favorisé l’éclosion de la vérité autour de ce projet. Initialement, le projet est dénommé Centre Hospitalier Universitaire d’Abomey- Calavi. Ce qui devrait signifier CHUAC ou CHU d’Abomey-Calavi. C’est le gouvernement qui l’a transformé en Centre Hospitalier International de Calavi( CHIC) pour flatter ou impressionner. Les nombreux articles sur les sites de la Société Générale ou même du groupe Bouygues renseignent suffisamment sur cette appellation. La première est la banque qui a permis de lever le financement des 175 millions d’Euros initialement prévus pour le montage financier, le design et la construction de ce hôpital. Le second est le groupe de BTP français qui a conduit les travaux. Le plan est conçu par le cabinet d’architectes français Miche Beauvais. Sur le financement, la déclaration d’Emmanuel Macron le lundi 05 mars 2018, date de la prise de la décision de financement de ce projet à l’Elysée fait foi. On voit le président français en compagnie de son homologue du Bénin Patrice Talon affirmer urbi et orbi : « La première priorité en matière de santé c’est le futur Centre Hospitalier et Universitaire d’Abomey-Calavi. Et, nous confirmons la garantie de la banque publique d’investissement avec une assurance crédit de 175 millions d’euros ». La France a donc confirmé la garantie auprès de la banque publique d’investissement et le financement est lui accordé par la Société Générale. Ce discours tranche avec toutes les déclarations postérieures, en occurrence celle du porte-parole du gouvernement , qui affirmait le12 octobre 2022 que « C’est le Bénin qui a levé des financements. C’est le Bénin qui a apporté le complément des ressources du budget national et c’est le Bénin qui met toute l’attention qu’il faut afin qu’il soit réalisé aux normes et standards internationaux afin que demain, ils servent de plateforme sanitaire pour des étrangers, africains ou d’ailleurs qui viennent en tourisme sanitaire. Ce serait tant mieux pour nous mais, ça n’est pas une raison pour penser que ce que nous faisons avec autant d’effort, avec autant d’engagement de nos citoyens serait la propriété d’un autre état ». Il semble insinuer que c’est un projet du gouvernement béninois. Dans un projet d’infrastructures comme celui là, il est important de savoir qui apporte le financement, qui conçoit le plan, qui construit… ». Aucun des trois n’est béninois comme le disait plus haut. Le Bénin n’aura pas non plus la gestion de cet hôpital de référence. Elle est confiée à Assistance Publique- Hôpitaux de Paris qui est établissement public de santé français qui exerce le rôle de centre hospitalier universitaire pour Paris et l’Île-de-France. Jusque là, la seule intervention du Bénin dans le projet se limite à l’octroi du domaine de 400.000 mètres carrés. En un mot, il s’agit d’un projet BOT( Buld, Operate and Transfer). La France, construit, administre avant de transférer la gestion au Bénin quelques années après.
Pour le bonheur des autres
Mais le plus frustrant de ce projet c’est que cet hôpital n’est pas construit pour le public béninois. Selon nos recoupements, les hôpitaux de zone du Bénin ne peuvent pas référer leurs patients sur cet hôpital comme ils le font pour le Centre National Hospitalier et Universitaire. Le CHIC n’est donc pas dans la carte sanitaire du Bénin. C’est face aux maladies graves dont les diagnostics demandent un plateau technique de haut niveau et un traitement délicat et de longue durée pour des maladies jugées elles mêmes graves que les patients peuvent être référés à cet hôpital. En termes claires, c’est lorsque le cas du patient demande une intervention une évacuation sur la France et d’autres pays qu’il peut y être envoyé. Au regard de celà, il apparaît clairement que c’est une élite qui peut avoir accès à cet hôpital et en bénéficier des services. Selon des sources concordantes, la France a décidé de financer ce projet pour limiter, voire arrêter le nombre de personnes qui envahissent la France chaque année avec sans oublier les garde-malade. Le personnel estimé pour servir dans l’hôpital est de 1028. La France se serait taillé la part de Lion avec plus de 40% du personnel, 30 % pour le Bénin et le restant pour les autres nationalités. Selon toujours les mêmes sources, la majorité des agents de l’AP-HP affectée à Cotonou est en préretraite, soit environ 400 personnes qui vont descendre à Cotonou avec famille. Une clientèle potentielle pour le lycée français Pierre Manoël Talon qui ouvre bientôt ses portes à Cotonou. Qui est fou ! Construire et inaugurer un tel projet sous le mandat de Patrice Talon était déjà suffisant pour flatter les populations et vendre le produit » Talon ». Les autres arguments apparaissent superfétatoires. Le diable malheureusement s’est retrouvé dans les détails.