Souhaité et réclamé par les professionnels des médias depuis plusieurs décennies, la Haute Autorité de l’audiovisuelle et de la Communication (HAAC) est enfin présidé par un journaliste, et pas le moindre. Edouard Loko puisque c’est de lui qu’il s’agit a été nommé par le Président Patrice Talon pour présider l’institution chargée de réguler le secteur des médias et de la communication au Bénin. Ce vœu exaucé des animateurs de la presse béninoise pourra-t-il étancher la soif du quatrième pouvoir dont les conditions de vie et de travail sont depuis quelques années des plus exécrables ? De toute évidence, l’homme des médias malgré ses expériences a été nommé par un politique qui a des objectifs politiques à atteindre. Et c’est là que se situe le premier défi auquel cette HAAC d’Edouard Loko devra faire face. Comment se départir de la politique pour travailler à la professionnalisation de la presse béninoise et à l’amélioration des conditions de travail et de vie de ses acteurs ? Ce grand défi ne doit pourtant pas l’emporter sur les besoins actuels de la corporation du désormais Président Edouard Loko. Et parmi ses besoins, il convient de citer :
L’assainissement de la presse béninoise
Qui est journaliste et qui ne l’est pas ? Cette question reste posée avec le développement des réseaux sociaux et la prolifération des web activistes, les influenceurs. Du coup, il est difficile pour les consommateurs de distinguer les professionnels de la presse à cette nouvelle catégorie de diffuseurs d’informations. Conséquence, le métier de journaliste est traité par terre et dans la boue au point où les acteurs des médias sont clochardisés et réduits à zéro.
L’arrivée, à la tête de la HAAC d’un journaliste de la taille d’Edouard Loko doit alors contribuer à assainir cette corporation afin de lui redonner sa lettre de noblesse, et sortir la presse béninoise de son agonie.
Le rétablissement et le renforcement de l’aide de l’Etat à la presse
Ramener et renforcer l’aide de l’Etat à la presse et en faciliter l’obtention aux organes de presse est une priorité des priorités pour la HAAC.
En effet, l’Aide de l’Etat à la presse à partir de 2016, devrait être mutée au Fonds d’appui pour le développement des médias (FADeM), les patrons de presse traînaient ce problème avant que la COVID-19 ne vienne empirer la situation. Et depuis, l’aide a été suspendue sans que personne ne dise quand elle pourra revenir pour soulager les organes de presse. Une situation qui a plongé totalement la presse déjà souffrante des insertions publicitaires des entreprises à cause de l’économie nationale de jour en jour moribonde. A cette mandature, la HAAC présidée par le journaliste Loko doit faire du retour et du renforcement de l’aide de l’état à la presse une priorité pour redonner de l’espoir aux entreprises de presse et améliorer les conditions de vie et de travail des professionnels des médias.
La mise à jour et l’application effective de la convention collective
Les journalistes béninois sont majoritairement sans salaire. Ceux qui en ont sont à des miettes juste pour couvrir à peine la 10ème de leurs besoins mensuels. Ceci pour cause, aucun dispositif juridique ne réglemente véritablement ou n’encadre le traitement salarial des professionnels des médias. Du coup, chaque patron de presse rémunère ses collaborateurs selon ses moyens et selon son bon vouloir. Le problème de chômage se posant avec acuité dans le pays, le professionnel des médias n’a donc d’autres choix que de se contenter des miettes appelées salaires que son patron lui remet à la fin de chaque mois ou parfois de façon sporadique.
En mettant à jour la convention collective existante et en faisant de son application une obligation pour tous les médias, la HAAC Loko aura relevé un grand défi qui contribuera non seulement à soigner beaucoup de maux dont souffre la presse béninoise aujourd’hui mais aussi et surtout, responsabiliser les organes de presse qui pourront devenir de véritables entreprises de presse au Bénin.
La professionnalisation de la presse
N’est pas journaliste qui veut mais qui peut. Les journalistes béninois après leur sortie de l’école manquent cruellement de recyclage. Pour les rendre plus professionnels, une mise à jour régulière de leurs connaissances doit être encouragée et soutenue aussi bien par leurs employeurs que par les associations des professionnels des médias et surtout par la HAAC. Chaque année, un certain nombre de formations sur des thématiques bien précises doivent être initiées et financées par la Haute Autorité de l’Audiovisuelle et de la communication pour le renforcement des capacités de ceux qui exercent le métier. La HAAC Loko doit contribuer à la formation des journalistes en encourageant l’octroi des bourses d’études aux acteurs des médias. Elle doit aussi accompagner le monde des médias dans la création de réelles entreprises de presse qui nourrissent leurs animateurs et apportent de plus-value à l’économie nationale. A la fin de cette mandature, Edouard Loko doit s’assurer que les conditions de vie et de travail des professionnels des médias sont considérablement améliorées. C’est seulement à ce prix que cette HAAC aura relevé ces très grands défis.
Comlan Paul ODAH
CPO