À l’approche de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025, Reporters sans frontières (RSF) publie un rapport accablant sur 42 ans de restrictions contre la presse camerounaise. De l’assassinat de journalistes à la censure présidentielle, l’organisation pointe dix obstacles systémiques à la liberté d’informer.
Depuis son arrivée au pouvoir il y a 42 ans, le président Paul Biya, désormais âgé de 92 ans, est au cœur d’un contexte où la presse camerounaise a rarement été aussi menacée, selon RSF. Parmi les dix principaux freins identifiés on retient l’assassinat de Martinez Zogo en 2023, la mort en détention de Samuel Wazizi en 2019 dans des conditions empreintes de soupçon de torture, ou encore l’incarcération arbitraire prolongée d’Amadou Vamoulké, ancien directeur de la CRTV, condamné à 32 ans de prison.
Le rapport détaille aussi l’utilisation de lois telles que la loi antiterroriste pour faire taire les voix critiques — des journalistes condamnés à de lourdes peines dans des procès militaires pour » sécession » ou » complicité « . La censure couvre même la santé du président où depuis octobre 2024, tout débat médiatique sur sa condition est interdit au nom de la » sécurité nationale « . En parallèle, le Conseil national de la communication (CNC), organe de régulation, est décrit comme « inféodé au régime », ses membres étant nommés par décret présidentiel, et multipliant avertissements et suspensions contre les médias indépendants. Dans la période précédant la présidentielle de 2025, les journalistes subissent des obstacles pratiques : double accréditation, absence de cartes de presse, suspensions d’émissions politiques, empêchés de couvrir l’opposition ou des événements publics.
Une dérive mesurée dans les classements
RSF rappelle que le Cameroun était 83ᵉ au classement mondial de la liberté de la presse en 2005 . Mais aujourd’hui il occupe la 131ᵉ place sur 180 pays. « Ces dix dernières années, le Cameroun stagnait autour de la 130e place, témoignant à la fois du peu d’efforts déployés par les autorités pour améliorer la situation, mais aussi du climat hostile rencontré par les professionnels des médias : le Cameroun continue de constituer l’un des pays les plus dangereux du continent », déplore RSF.
Par ce communiqué, RSF appelle le futur gouvernement à faire de la liberté de la presse une priorité, afin de restaurer l’accès à une information libre, condition essentielle d’une véritable démocratie.
Ezéchiel Dagbégnon PADONOU