A moins de deux mois du dépôt des candidats à l’élection présidentielle d’Avril 2026, les partis politiques capables de présenter un ou plusieurs duos de candidats affûtent leurs armes de divers manières. Au sein des Démocrates, seul parti de l’opposition à avoir cette possibilité, les choses s’annoncent plus compliquées. Le parti devra surmonter plusieurs pièges dont celui- très risqué- de l’auto-parrainage.
Le parti Les Démocrates pourra-t-il participer à l’élection présidentielle de 2026 ? Si les dispositions du Code Electoral lui sont favorables, surtout en ce qui concerne le nombre requis de parrainage, le parti dirigé par l’ancien président Boni Yayi va devoir batailler dur pour passer les nombreux check points qui se dressent sur le chemin de la candidature.
Le plus gros piège est celui des parrainages. Le parti devrait faire preuve de grande cohésion interne en ne laissant pas s’échapper de la nasse LD l’un seulement des vingt huit députés reconnus, au regard du Code Electoral, comme le nombre requis de parrains. Si l’un manque, le parti n’aura plus la possibilité de présenter un duo de candidatures pour l’élection. Pour éviter le piège de la perte d’un parrain, le parti a soumis chacun de ses vingt huit députés à un serment de fidélité et de non trahison qui consistait pour d’eux à faire une déclaration publique de remettre sa fiche de parrainage au parti une fois qu’il l’aura reçue.
A peine le parti s’évertue à relever le défi de la sécurisation des fiches de parrainage qu’un autre défi vient perturber sa quiétude. Il s’agit des conditions à remplir par ceux qui doivent parrainer. Peut-on se parrainer soi-même? Autrement dit, un député ou un maire désigné par son parti pour être candidat à l’élection présidentielle peut-il se parrainer ? La loi reste muette sur cette préoccupation laissant place au doute et à toutes les interprétations possibles. Depuis quelques jours, une folle rumeur répandue à partir d’une confidence qu’aurait lâchée un membre de la majorité présidentielle distille qu’un député ou un maire ne saurait se parrainer. Cette rumeur trouve d’ailleurs son bien-fondé dans la signification même du parrainage. Selon le dictionnaire, parrainer c’est « accorder son parrainage à », c’est aussi « servir de caution à quelqu’un en le faisant admettre dans une société ou une structure ». Le parrainage politique consiste à apporter sa caution à un candidat pour une élection. Ainsi défini, dans le parrainage, on voit l’action d’une personne à autrui. « Un candidat ne peut donc pas se parrainer », souffle la confidence.
Angoisse
Si cette rumeur circule, elle n’ébranle guère les états-majors du Bloc Républicain, de l’Union Progressiste le Renouveau. C’est au sein du parti Les Démocrates qu’elle crée la plus grande angoisse. Et pour cause, c’est presque le seul parti dont les candidatures éventuelles annoncées sont des eux-mêmes des parrains. L’UP-R, forte de ses 96 parrains ( 53 députés et 43 maires) a la possibilité de présenter trois duos de candidatures pour la présidentielle avec des réserves de parrains. De plus, parmi ses potentiels candidats annoncés que sont Joseph Djogbénou, Romuald Wadagni, José Tonato et bien d’autres, aucun d’eux n’est parrain. Le cas Luc Atrokpo agité de temps à autre, reste une option subsidiaire. Situation presque identique au BR où les 56 parrains(28 députés et 28 maires) peuvent présenter deux duos de candidats. Bertin Koovi, Fred Houenou qui ont tous deux annoncé leurs candidatures ne sont ni maires, ni députés. Samou Séidou Adambi dont la candidature est agitée ne l’est pas non plus. Quant à Barthélémy Kassa dont le nom circule, il pourra trouver une solution pour éviter l’auto-parrainage s’il était le choix du parti qui a une marge de manœuvre au-delà d’un seul duo.
Mais au sein du parti Les Démocrates, la situation est inquiétante. Presque tous les candidats sérieux annoncés sont des députés. On susurre les noms d’Eric Houndété, de Nourenou Atchadé, de Kamel Ouassagari. D’autres noms comme Achille Loko, Adam Sounon Kondé, Bio Sawé, Nourou Deen Saka Saley et autres ont annoncé leurs candidatures au nom de parti sans pour autant avoir les mêmes calibres que les autres.
Piège
Alors que les deux partis de la majorité présidentielle tentent visiblement d’éviter l’auto-parrainage, le parti Les Démocrates devrait-il faire autre chose et compter sur les non-dits de la loi électorale ? Une telle option serait un véritable coup de poker. Ceci équivaudrait à une élimination sur tapis vert devant une Cour Constitutionnelle dont personne ne peut s’assurer de la posture et de l’impartialité dans ce cas là. Car en vérité, l’émergence du débat sur l’interdiction potentielle de l’auto-parrainage ressemble comme deux gouttes d’eau à celle de l’éviction des candidats sous le coup des poursuites judiciaires par le parti Les Démocrates en 2023 lors des élections législatives. Tel le vent, la rumeur avait couru, venant de nulle part pour aboutir à l’éviction par le parti de certains de ses valeureux candidats de la liste. L’objectif était d’affaiblir la liste en la privant de certaines personnalités fortes. N’est-ce pas la même stratégie qui consistera cette fois-ci à éliminer certaines candidatures crédibles ? Malheureusement, elle risque de prospérer car tenter autre chose serait comparable à une provocation du diable.
Pour confirmer leurs candidatures, une seule possibilité s’offre à ces députés, la démission de l’Assemblée Nationale et leurs remplacements par leurs suppléants pour le reste du mandat. Mais, ils ne seraient pas pour autant sortis de l’auberge. Les suppléants devront attendre la prochaine section ordinaire de l’institution pour siéger. Selon l’article 4, alinéa3 du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale, « La deuxième session s’ouvre dans le cours de la seconde quinzaine du mois d’Octobre ». Pour faire simple, ces députés suppléants devront attendre une hypothétique convocation de la session entre le 15 et le 30 Octobre pour siéger. Or, selon le calendrier électoral, les candidatures doivent être clôturées le 14 Octobre. Face à cette donne, le parti n’a qu’un seul choix : choisir des candidats qui ne comptent pas parmi les 28 parrains.