Jamais dans l’histoire du Bénin, depuis l’année académique 1969-1970, un taux de réussite au baccalauréat n’avait atteint un tel sommet. Avec 73,02 % de réussite en 2024-2025, le pays vient de battre son propre record, loin devant les 64,40 % obtenus en 2020-2021. Un boum spectaculaire qui suscite autant de fierté que de scepticisme.
En 1982-1983, le Bénin enregistrait le plus faible taux de réussite de son histoire : 8,13 %, suivi de près par 8,93 % l’année suivante. Cette époque de rigueur académique était considérée comme un filtre strict pour accéder à l’université. Aujourd’hui, en fin de mandat du président Patrice Talon, le gouvernement de la rupture semble vouloir boucler la boucle en beauté avec des indicateurs flatteurs, notamment dans le secteur de l’éducation.
Mais cette hausse soudaine, aussi impressionnante soit-elle, interroge. Comment expliquer une progression aussi importante alors que le système éducatif béninois n’a pas connu de révolution structurelle visible ces dernières années ? Faut-il y voir une réelle amélioration de la qualité de l’enseignement comme le disent-ils ou une manœuvre politique bien orchestrée à l’approche de la sortie du régime Talon ?
Certes, pendant l’année académique 2024-2025, le système béninois n’a connu aucune perturbation. Pas de grève, pas de retard des enseignants, pas trop de grossesse non désirée et même subvention des travaux dirigés. Mais celà ne devrait quand-même pas montrer à tous que l’examen est désormais comme de l’eau à boire.
Certains observateurs y voient une tentative de légitimation du bilan gouvernemental à l’international, comme pour dire que la jeunesse béninoise réussie. Une stratégie de communication habile, certes, mais qui pose la question de la solidité des compétences acquises par ces nouveaux bacheliers. Sont-ils véritablement prêts pour les exigences universitaires ? Ou assiste-t-on à une dilution des critères d’excellence au profit d’un taux de réussite politiquement valorisable ? La question reste entière.
Le parallèle avec les années 70, marquées par la fameuse ère du « monstre à trois têtes », où une légère hausse avait aussi été enregistrée, revient dans les discussions. Mais jamais on n’avait observé une telle flambée de pourcentage. Une performance inédite qui, si elle flatte les chiffres, ne doit pas occulter le fond : quelle est aujourd’hui la véritable valeur d’un baccalauréat au Bénin ?
Gildas AHOGNI