Le 1er décembre 1944, au camp militaire de Thiaroye, près de Dakar, dans la colonie du Sénégal, l’armée coloniale a tiré sur une foule de combattants démobilisés de plusieurs fronts en France. Ils ne réclamaient que le paiement de leurs indemnités et le versement du pécule qui leur était promis depuis des mois. En réponse à leur revendication, l’armée coloniale décide de tirer sur eux et faire plusieurs dizaines de morts. Le nombre d’anciens combattants tués dans ce massacre varie selon les sources. 35 morts pour certains, 70 pour d’autres, 191 pour d’autres encore, c’est selon.
Mais au-delà du nombre de personnes tuées, c’est l’ingratitude et la barbarie qui caractérisent cet acte qui attristent tout le monde. Se faire fusiller par une personne que vous avez aidé quelques jours plus tôt, il n’y a rien de plus injuste que celui là. Le massacre ne sera jamais élucidé et les bourreaux n’ont manifesté le moindre remord ou la moindre compassion pour ceux qui les ont aidés à gagner la guerre. Cette affaire est restée pendant longtemps avant de mourir. Il a fallu compter sur l’engagement de Ousmane Sembène qui écrit « Le campe de Thiaroye » dans lequel il décrit cette tragédie.
Aujourd’hui, l’éveil des consciences noté en Afrique a permis à la majorité des Béninois de savoir ce qui s’est passé à Thiaroye ce 1er décembre 2022.
Deux personnages sont pointés du doigt dans cette affaire. Il s’agit du Général Marcel Dagnan qui a autorisé les tirs et le ministre de la défense de l’époque qui s’appelait René Pleven. C’est ce dernier qui a posé un lapin aux tirailleurs en leur demandant de rentrer dans leurs pays afin de recevoir leurs soldats.
Avec le recul, on se demande pourquoi nos dirigeants peuvent donner le nom d’un personnage aussi lugubre comme René Pleven à un stade de football. Comment peut-on accepter d’immortaliser son bourreau ? Comment peut-on on immortaliser celui qui vous a humilié ? Au nom de l’histoire et de la dignité, René Pleven ne pouvait figurer au fronton d’aucune infrastructure ou rue en Afrique. Ceux qui ont baptisé le premier stade de Cotonou René Pleven sont sûrement ceux qui ont écrit notre histoire à notre place et qui pensent que « l’Afrique n’a pas d’histoire ». Autrement, ils auraient accepté de jouer le rôle du traître. Changeons donc très vite le nom de ce stade pour sauver notre dignité d’africains. Vivement !