L’un des faits marquants les 8 ans de Talon au pouvoir, ce sont des déclarations ou des propos qui ont horripilé les Béninois et refroidi leurs fiertés. Selon nos investigations, ces propos ont été tenus majoritairement par le chef de l’Etat à diverses occasions. Les propos de deux ministres reviennent dans le lot des propos et déclarations détestables de ces 8 dernières années.
L’avènement du régime de la rupture a semblé ouvrir la voie à une agressivité communicationnelle et un discours qui, bien que dénudé de toute hypocrisie, passe pour des propos blessants. Le chef de l’Etat en a été le chantre. A travers un sondage, notre rédaction a interrogé 865 personnes sur les propos qui les ont les plus frustrés depuis 2016. Le point des sondages donnent sept déclarations dont une n’a pas été tenue pendant le temps du pouvoir de la rupture mais au moment des élections par Patrice Talon dans « Moi Président » lorsqu’il affirme que : « Ne soyez pas sourd à ce que je dis. Ce qui permet à un Président d’être réélu avec assurance, ce qui assure la réélection des Présidents, ce n’est pas son mandat, ce n’est pas ses performances, ce n’est pas ses résultats. C’est la manière dont il tient les grands électeurs. C’est la manière dont il tient tout le monde. C’est la manière dont personne n’est capable de lui tenir tête, d’être compétiteur contre lui. Quand vous n’avez pas de compétiteur, vous avez beau être mauvais, vous serez réélu ». Beaucoup de Béninois ont pu dire que cette déclaration est celle qui les a le plus gênés pendant les 8 ans du pouvoir de la rupture en ignorant qu’elle avait été tenue par le candidat Patrice Talon.
La déclaration qui vient en tête des plus détestées par les Béninois est : « Vous allez en souffrir mais vous ne pouvez rien faire ». Il s’agissait d’une déclaration du chef de l’Etat tenue devant les travailleurs du port de Cotonou qu’il voulait dissuader de ne pas faire une grève politique sur le choix du prochain Directeur Général de la société. Il disait ceci : « Vous allez en grève parce que j’ai nommé un DG illettré, incompétent et tout mais qui est un partenaire politique important ?! Vous allez en souffrir mais vous ne pouvez rien faire». La phrase qui a blessé plus d’un a été sorti de son contexte et généralisé à l’échelle nationale. Pour beaucoup, cette phrase est l’expression caractéristique de l’autoritarisme à la tête de l’Etat et affiche, selon les mêmes sources, « le mépris des populations dans la prise des décisions ». Et pour d’autres, une « résignation à la souffrance et à la mort lente ».
Vient en 2è position, « parfois, le pardon peut être une faute », la phrase récente tenue par le chef de l’Etat face à une délégation du parti Les Démocrates qu’il a reçue le 28 novembre 2023 à la Présidence de la République. Sur une demande pressante du président Boni Yayi de pardonner Reckya Madougou pour sa faute et de la libérer, Patrice Talon a répliqué violemment en disant que : « Si les acteurs politiques ne doivent pas rendre compte de leurs actes ce n’est pas bien(…). Parfois le pardon peut être une faute». Et pour bon nombre parmi elles, un humain ne peut pas dire cela puisqu’il est lui-même un pécheur, un fauteur.
Beaucoup de béninois ont également affiché une aversion pour la déclaration « le Bénin est un pays de pagaille ». Plusieurs personnes eux ont trouvé cela maladroit. Ce jour 4 février 2017, le chef de l’Etat recevait la communauté musulmane du Bénin après une interdiction brutale des prières des vendredis sur les certaines places publiques. « Le Bénin est un pays de pagaille. Notre pays est un pays de pagaille mais si nous avons la volonté, nous pouvons changer les choses ».
Une dernière phrase du chef de l’Etat prononcée devant la conférence épiscopale retient l’attention de plusieurs personnes sondées. En 2018, alors qu’il rencontrait la conférence épiscopale, Patrice Talon affirme : « Nous allons compromettre la paix pour les temps à venir… ». Une déclaration, bien que sortie un peu de son contexte, est apparue comme attentatoire à la paix et l’ont assimilée à des propos excessifs venant d’un chef de l’Etat qui est garant de la paix et de la stabilité nationale.
Deux ministres dans l’œil de cyclone
Deux autres déclarations venant des ministres du gouvernement ont touché la sensibilité des Béninois. La première provient du ministre Hervé Hêhomey qui, le 19 août 2016 a menacé l’ancien Président Boni Yayi qui était allé visiter l’aéroport de Tourou sans l’autorisation du gouvernement. « Je profite de vos caméras et micros pour notifier à Boni Yayi qu’il ne devra plus jamais mettre les pieds sur ce site, s’il récidive, nous allons lui appliquer la rigueur de la loi. Il se serait comporté comme un vil individu et nous allons le traiter comme un vil individu ». Stupéfaits, cette déclaration avait suscité de l’émoi et de l’indignation pour ce que beaucoup ont qualifié de propos condescendants à l’endroit d’un ancien chef de l’Etat. 37 personnes sondées ont déploré ces propos de l’ancien Ministre des Infrastructures et des Transports comme celles qui ont affiché une image trop autoritaire du gouvernement. Enfin, 17 personnes sont revenues sur une ancienne déclaration du ministre Romulad Wadagni sans trop de précision. Ladite déclaration a été faite par le ministre en réaction à des propos des syndicats qui semblaient dire qu’aucun effort n’a été fait par le gouvernement en leur faveur. L’argentier national avait affirmé que les travailleurs réclamaient de l’argent pour prendre des croissants à leur petit déjeuner. Déclaration prise comme une injure à l’endroit des travailleurs parce qu’il pense que le croissant était un luxe pour eux.