Suite à l’ avis du 15 août 2024 du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire (GTDA) du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies qui a déclaré arbitraires l’arrestation et la détention du professeur Frédéric Joël Aïvo et demandant la libération immédiate du constitutionnaliste béninois, Maître Ludovic Hennebel, dans une interview accordée à notre rédaction , s’est prononcé sur l’avis du Groupe de Travail des Nations Unies sur la détention arbitraire concernant le Professeur Joel Aivo. Il a relevé dans cet entretien les 4 catégories de violations qui fondent cet avis du GTDA. Il n’a pas manqué d’apporter plus précision sur l’effet et les implications de avis du GTDA et la portée politique.
Pouvez-vous résumer l’essentiel de l’avis rendu par le Groupe de Travail des Nations Unies sur la Détention Arbitraire concernant le Professeur Aïvo ?
L’avis du Groupe de Travail des Nations Unies (GTDA) est clair et catégorique : la détention du Professeur Aïvo est arbitraire et constitue une grave violation de ses droits fondamentaux. Cette haute autorité des Nations Unies, composée d’experts internationaux indépendants, a souligné que son arrestation et sa condamnation reposaient sur des bases illégitimes, qu’elles visaient à restreindre ses droits à la liberté d’expression et d’association, et qu’elles révèlent une instrumentalisation du système judiciaire pour réprimer les voix dissidentes au Bénin. En conclusion, le GTDA appelle à sa libération immédiate et sans condition et recommande également des réparations pour le préjudice subi.
Comment le Groupe de Travail des Nations Unies justifie-t-il que cette détention soit qualifiée d’arbitraire ?
Le GTDA a identifié quatre catégories de violations qui fondent cette qualification :
• Absence de fondement légal : L’arrestation de M. Aïvo s’est déroulée sans mandat ni procédure régulière.
• Violation de ses droits fondamentaux : Il a été poursuivi pour avoir exercé ses droits à la liberté d’expression et d’association.
• Manque d’équité dans le procès : La procédure judiciaire n’a pas respecté les standards internationaux d’équité, notamment du fait de l’influence de l’exécutif.
• Discrimination politique : Il est clair que cette détention vise à le punir pour ses opinions politiques et son rôle d’opposant.
Où se trouve actuellement le Professeur Aïvo et dans quelles conditions est-il détenu ?
Le Professeur Aïvo est actuellement emprisonné et est privé de nombreuses libertés de base. Il y a peu d’informations accessibles sur les conditions exactes de sa détention.
Quelles sont les conséquences de cette décision pour le Professeur Aïvo, tant au niveau juridique que personnel ?
Sur le plan juridique, cet avis devrait ouvrir la voie à sa libération et à un réexamen de la décision par les autorités béninoises. Sur le plan personnel, le Professeur Aïvo endure une privation de liberté injustifiée, loin de sa famille et de son environnement universitaire, avec une atteinte grave à son honneur, sa réputation et son intégrité physique et morale.
Que signifie cet avis du GTDA pour le Bénin et son système judiciaire ?
Cet avis est un signal d’alarme important. Il révèle des dysfonctionnements graves au sein du système judiciaire béninois, notamment une absence d’indépendance et d’impartialité dans certaines affaires sensibles, et une instrumentalisation de la justice à des fins politiques. Cet avis montre que la communauté internationale prend acte de cette situation et qu’il est urgent pour le Bénin de revenir à des pratiques conformes aux engagements internationaux. Quand la justice punit les défenseurs des droits et des libertés, elle se fait complice de l’injustice.
En emprisonnant Joël Aïvo pour ses convictions, le Bénin tourne le dos aux valeurs démocratiques qui fondent la société humaine. Il est temps de corriger cette injustice et de rendre à l’État de droit sa vraie signification.
Quelle est la valeur juridique de cet avis des Nations Unies ? Est-il contraignant ?
L’avis du GTDA a une autorité juridique incontestable et il est impératif pour le Bénin de le mettre en œuvre sans délai. Cet avis a par ailleurs une très grande valeur morale et diplomatique. Les États membres des Nations Unies sont tenus de respecter les recommandations du GTDA, qui reposent sur le droit international des droits de l’homme. Ne pas se conformer à cet avis nuirait gravement à la réputation du Bénin et engagerait sa responsabilité internationale. Un Etat qui prive arbitrairement de liberté les défenseurs des droits de l’homme et de la démocratie, et qui ignorerait un tel avis d’un groupe de travail des Nations Unies constatant avec autant de force le caractère arbitraire de la détention, n’a aucune crédibilité diplomatique au sein des instances internationales. Ce serait un affront inacceptable fait aux valeurs fondamentales des Nations Unies.
Quand un État criminalise la parole de ceux qui défendent la justice et la démocratie, c’est la dignité de toute une nation qui est mise en péril. Joël Aïvo, défenseur des droits et de la liberté, doit être libéré.
Quelles sont les prochaines étapes ? Que comptez-vous faire pour obtenir la libération du Professeur Aïvo ?
Nous demandons aux autorités béninoises de libérer immédiatement le Professeur Aïvo, en respect de cet avis. Parallèlement, nous allons continuer à mobiliser les organisations de défense des droits de l’homme, la société civile, et les instances internationales pour maintenir la pression et garantir que justice soit rendue. Nous envisageons également des actions supplémentaires si nécessaire.
Allez-vous engager une procédure judiciaire ou internationale pour faire respecter cet avis ?
Nous privilégions d’abord la voie diplomatique, en espérant que le Bénin respectera ses engagements internationaux. Cependant, d’autres actions pourraient être envisagées en collaboration avec les instances internationales compétentes, si nécessaire, pour faire respecter les droits du Professeur Aïvo.
Pensez-vous que cette affaire a une dimension politique ?
Absolument. Cette affaire est symptomatique de la répression politique au Bénin, où les critiques du gouvernement et les défenseurs des droits de l’homme sont muselés. Le Professeur Aïvo a été arrêté et condamné uniquement pour ses opinions et son engagement politique pacifique. Cet avis du GTDA souligne que sa détention est motivée par des raisons politiques et non juridiques.
Joël Aïvo n’a pas commis de crime ; il a exercé sa liberté d’expression et défendu le droit de participer aux affaires publiques. Son emprisonnement est un rappel brutal des dangers auxquels sont confrontées les démocraties qui étouffent la dissidence.
Pourquoi, selon vous, le Bénin agit-il de cette manière ?
Le Bénin traverse une période de régression démocratique où les voix dissidentes sont de plus en plus réprimées. Le cas de M. Aïvo illustre la volonté de restreindre l’opposition politique et de contrôler les critiques. Ce contexte n’est pas unique au Bénin, mais il est particulièrement préoccupant car il s’agit d’un pays autrefois modèle en matière de démocratie en Afrique.
Joël Aïvo est derrière les barreaux pour avoir défendu la justice et la démocratie – des principes que toute nation se doit de protéger. Aujourd’hui, c’est sa liberté qui est entravée ; demain, c’est celle de tout le Bénin qui sera menacée.
Avez-vous reçu des soutiens internationaux ?
Oui, plusieurs organisations de défense des droits de l’homme, des universitaires et des acteurs internationaux, se sont déjà mobilisés pour dénoncer cette détention arbitraire, d’une manière explicite ou plus feutrée. Nous travaillons activement avec ces alliés pour renforcer notre appel en faveur de la libération du Professeur Aïvo.
Que peut faire la communauté internationale pour aider le Professeur Aïvo ?
La communauté internationale peut jouer un rôle crucial en exerçant des pressions diplomatiques sur le Bénin pour qu’il se conforme à ses engagements internationaux. Des pays et organisations peuvent également exprimer publiquement leur soutien, ce qui augmente la visibilité de l’affaire et la pression pour obtenir sa libération.
Cet avis a-t-il des implications plus larges pour la situation des droits de l’homme au Bénin ?
Absolument. Cet avis révèle des violations systématiques des droits de l’homme et une atteinte grave aux principes d’un État de droit démocratique. La persécution des opposants politiques et la restriction des libertés civiles sont des signes inquiétants d’une régression démocratique.
Joël Aïvo est aujourd’hui derrière les barreaux pour avoir fait preuve de courage. Un État qui écrase la liberté de penser est un État qui choisit l’obscurité.
Pensez-vous que la situation au Bénin va évoluer suite à cet avis ?
Nous espérons que cet avis aura un effet positif et incitera le Bénin à adopter des réformes pour renforcer l’indépendance de son système judiciaire et respecter les libertés fondamentales. Ce serait un pas essentiel pour restaurer la confiance du public dans les institutions et pour renforcer la stabilité démocratique du pays.
L’incarcération de Joël Aïvo ne vise pas un homme, elle attaque un principe : celui de la liberté de conscience et de la justice. Cette persécution d’une voix libre est une blessure infligée à toute la société béninoise et au-delà, à toute humanité. Joël Aïvo doit être libéré immédiatement.
Le Bénin doit répondre à cet appel de justice et restaurer l’honneur de la nation en libérant immédiatement Joël Aïvo.
Comment le Professeur Aïvo et sa famille réagissent-ils à cet avis ?
Le Professeur Aïvo et sa famille ont accueilli cet avis avec soulagement, car il reconnaît enfin publiquement l’injustice de sa situation. C’est un signe d’espoir pour eux, bien que l’attente de sa libération soit toujours difficile à vivre. Ils espèrent maintenant que les autorités béninoises agiront en conséquence pour lui rendre sa liberté.
Quelle est votre implication en tant qu’avocat dans cette affaire et pourquoi est-elle importante pour vous ?
Je me suis engagé dans cette affaire par devoir professionnel et éthique. La situation du Professeur Aïvo est emblématique des abus de pouvoir et des injustices qui persistent dans certaines régions du monde, et je suis déterminé à œuvrer pour qu’il recouvre sa liberté et sa dignité. Défendre la justice et les droits de l’homme est au cœur de ma mission d’avocat