Directeur du Club de lecture ‘’Amandina’’, de Honton, dans la commune du Dogbo, département du Mono, M. Paul Ago, administrateur de l’Action Culturelle à la retraite depuis 14 ans, a organisé une séance de café littéraire, en avril dernier, au profit des apprenants et adultes ayant la soif de lire et de faire des recherches sur internet. Ancien fonctionnaire au Ministère en charge de la culture, il dévoile les raisons qui motivent la création de son espace, le contenu du café littéraire, et enfin, l’appel au soutien des mécènes. Entretien
Dites-nous ce qui vous a motivé concrètement à la création de cet espace dédié à la lecture et à la recherche.
« J’ai mis en place cet espace de lecture et de culture, pour permettre aux élèves de venir lire, de venir s’instruire et de venir se cultiver. Pour permettre aux gens, ceux qui n’ont pas la capacité, de venir naviguer sur Internet, de faire des recherches. Donc c’est la raison fondamentale pour laquelle j’ai créé cet espace. Nous avons jugé important de créer cet espace, parce qu’à l’époque, le résultat du Mono -Couffo était minable. On vacillait entre 25% et 35% du taux d’admission les résultats des différents examens. Je crois que ce n’est pas normal. De notre temps, quand on était au lycée, c’était 95% du taux d’admission. Donc je voulais imiter un peu ce qu’il se passait au lycée à notre époque ».
En créant cet espace depuis 2010, est ce que votre objectif atteint lorsqu’on observe aujourd’hui les statistiques des résultats ?
« Oui, cet espace a véritablement influencé les résultats. Parce que, ceux qui fréquentaient régulièrement le centre, quand ils vont aux examens, ils réussissent toujours. Il y a eu des élèves qui sont passés par ici qui ont eu 16,80 de moyenne à l’examen du baccalauréat. Certains ont eu 14 de moyenne à l’examen du baccalauréat. Ceux qui n’ont pas travaillé avaient autour de 12 de moyenne pour réussir au bac. Et à l’époque, ils avaient tous de bourse. Donc c’était vraiment bien. Je suis vraiment satisfait. Mais ce que je regrette, c’est que les enfants ne sont pas décidés à venir fréquenter le centre. Voyez-vous, il y a des gens ici qui viennent de me dire que c’est aujourd’hui qu’ils ont su qu’il y a un centre ici. Alors que ça fait 14 ans que c’est bien installé. Donc je crois que ceux qui sont venus pour la séance de lecture joueront désormais le rôle d’ambassadeur auprès de leurs collègues. Sinon qu’eux, ils pourront venir massivement lire et travailler. Ce n’est pas seulement lire. Les enfants sont venus rester ici toute une journée et travailler ».
Est-ce que vous ne pensez pas que, c’est par manque de stratégies de communication locale que le public ne fréquente pas massivement l’espace ?
« Je crois qu’on dit souvent que beaucoup de viandes ne gâtent pas la sauce. Donc maintenant, je vais essayer de prendre la langue avec les crieurs publics, avec les délégués afin de renforcer la communication au profit de l’espace. Le délégué d’Avégodé vient régulièrement lire. Il nous aidera à amplifier l’information. Et je crois que comme ça, tous les élèves seront informés ».
Quelle est la quintessence du Café littéraire que vous avez organisé ?
« Le café littéraire, c’est quoi ? C’est inviter des gens, des élèves, des notables, bref le public à venir au son d’un petit café. C’est ce que nous venons de faire ce matin. Donc si on avait plus de moyens, on aurait pu faire 100 personnes. Donc nous avons même l’idée de créer ce qu’on appelle « Lire en fête ». Lire en fête, c’est quelque chose que j’ai déjà le plein. Tout est déjà construit. Et je crois que l’une des prochaines fêtes, je vais essayer de réunir les gens, peut-être à Dogbo, peut-être à Athiémé. Et nous allons lire. Il y a environ une centaine de personnes. Nous allons lire pendant deux heures et puis après un petit repas. En tant qu’agent retraité, je sais que ce n’est pas facile avec les maigres pensions ».
Depuis 14 années vous tenez ce pari. Quelles sont vos sources de financement ?
« Au début, j’ai été appuyé par quatre structures majeures. Il s’agit du Fonds d’aide à la culture, la Fondation Zinsou, la Direction de la Bibliothèque Nationale et la Fondation des parlementaires québécois. Ces structures m’ont fait don des livres afin de faciliter le démarrage effectif du projet. Aujourd’hui, comme je suis à la touche, c’est difficile d’avoir le financement du ministère en charge de la culture. Donc, vaille que vaille, avec ma pension, j’essaie d’organiser ces petites activités au profit de la population du Mono. Parce qu’organiser une activité comme celle que nous sommes en train de faire, ce n’est pas quelque chose de 20.000F.Cfa. Ce n’est pas quelque chose de 100 000. C’est plus de 100.000F.Cfa. Il faut vraiment vouloir pour le faire. Moi, je crois que ceux qui sont venus aujourd’hui, l’information qu’ils ont reçues, ça leur sera utile, et ils vont transmettre cette information aux autres qui vont en bénéficier».
Est-ce que vous avez fait le pas envers les autorités du ministère en charge de la culture afin de bénéficier leur soutien pour la pérennisation de cette initiative ?
« Honnêtement, depuis environ 5 ans, je ne suis plus régulier à Cotonou. Parce que, quand l’âge avance, on ne peut plus se déplacer régulièrement. Vous avez dit que des réformes ont été opérées dans le secteur des arts et de la culture. C’est une très bonne chose. Mais je crois que l’événement qu’on est en train de faire maintenant, ça nous donne encore beaucoup plus de courage. Et avec la publicité qu’on va en faire autour, je crois que je vais avoir encore des financements pour organiser encore beaucoup d’activités. Si c’est un programme d’activités, mon ordinateur est plein. Même si je dis, d’ici demain, ou bien d’ici après-demain, je peux organiser encore quelque chose comme ça. Je suis prêt à le faire. C’est seulement le financement qui est un peu problème. Nous souhaiterions que les mécènes de notre localité nous accompagnent, notamment, les opérateurs économiques. C’est dommage que ceux-ci n’écoutent pas souvent les gens de la culture. Vous voyez, la bibliothèque de Lokossa, elle est fermée depuis 14 ans. Alors pourquoi c’est fermé ? Qu’est-ce qu’il faut pour aller dans une bibliothèque ? Les livres sont là, le matériel est là, un agent. Est-ce qu’on a besoin de parcourir le monde, de continuer à New York pour aller trouver un agent pour pouvoir aller dans une bibliothèque ? Je ne crois pas. Je crois que la volonté, si nous avons un peu plus de volonté politique, nous allons faire beaucoup de choses. Nous avons le club de lecture en question. C’est quelque chose que j’ai vu à Paris. J’ai vu ça à Paris. C’est ça que j’ai pris contact avec les gens. C’est à l’image de ce que j’ai vu à Paris. ».
Propos recueillis Par DEDEGNONHOU Rodéric
