À moins d’un an des élections générales, la délivrance du quitus fiscal suscite une inquiétude croissante au Bénin. Jean-Baptiste Elias, président du Front des organisations nationales contre la corruption (Fonac), salue le principe mais dénonce une mise en œuvre chaotique et potentiellement discriminatoire, entre calendrier tardif, centralisation excessive et risques d’exclusion.
Le quitus fiscal est censé incarner l’éthique et surtout, garantir que tout aspirant à une fonction publique soit à jour de ses obligations fiscales. C’est une exigence accueillie positivement de prime abord, selon Jean-Baptiste Elias. Mais l’enjeu, affirme-t-il, ne réside pas dans l’idée mais dans le mode d’application.
En effet, au départ, la Direction générale des impôts avait exigé des candidats qu’ils précisent pour quelle élection (présidentielle, législative ou communale) ils sollicitaient le quitus. Elias jugeait cette logique absurde. Après des pressions de l’opposition et des échanges avec la DGI, cette condition a finalement été abandonnée. L’autre point de critique qu’a abordé Jean-Baptiste Elias est l’ouverture tardive de la plateforme de demande. Officiellement, le quitus doit couvrir les impôts payés jusqu’au 31 décembre 2024. Pourtant, le guichet en ligne n’a été activé que le 12 septembre 2025. « Celà représente une fenêtre extrêmement courte, à quelques semaines seulement de la date limite de dépôt des dossiers de candidature », a-t-il déploré.
La centralisation accrue, frein aux demandes
Depuis 2018, seule la direction générale des impôts ou son adjoint au niveau national est habilité à délivrer le quitus. Cette suppression de la décentralisation, auparavant assurée par les services fiscaux départementaux, suscite une pression accrue sur le siège national, générant goulots d’étranglement et retards. Elias relate son propre échec à obtenir le document malgré des démarches dans huit départements. « Dans des cas, on exige encore des pièces authentifiées physiquement auprès du service de Cotonou », a-t-il expliqué.
Par ailleurs, Jean-Baptiste Elias appelle les autorités à reprendre le dispositif de 2020, où tous les candidats avaient reçu le quitus sans exception. À défaut, avertit-il, le système pourrait se transformer en « machine à exclusions » et compromettre la crédibilité du scrutin. Pour le président du Fonac, le Bénin fait face à un dilemme. C’est celui d’une mesure louable sur le papier dont la mise en œuvre d’une manière alimente méfiance et suspicion. Le quitus fiscal, symboliquement outil de transparence, se retrouve au cœur des tensions à l’aube de 2026.
Gildas AHOGNI