Malgré sa bonne réputation quant à la qualité des formations dispensées, l’image de l’Université d’Abomey-Calavi est entachée depuis quelques années par un retard dans la délivrance des actes académiques. Le cas qui défraie actuellement la chronique est le service scolarité de la Faculté des lettres, langues, arts et communications (Fllac) qui brille par son incapacité à mettre à temps à disposition des étudiants leurs actes académiques.
« Depuis près de huit mois, j’ai déposé mes demandes de relevés de notes des six semestres sans les avoir. Je fais des déplacements inutiles et quand je viens ici, la seule question qu’on me pose est si j’ai reçu un message. Sur insistance, ils disent parfois tantôt qu’il manque un tampon, tantôt qu’il manque une signature et je retourne bredouille. J’ai manqué de postuler à des candidatures à cause des relevés ». C’est en ces termes qu’un étudiant, qui a préféré garder l’anonymat, a exprimé son ras-le-bol au niveau de la guérite du service de la scolarité de la Faculté des lettres, langues, arts et communications (Fllac) après une énième déception suite à au non-retrait de ses relevés de notes des trois années de licence. Il n’est pas le seul dans le lot. C’est le cas d’un autre étudiant qui a loupé la validation de son inscription dans une université à l’étranger pour la même raison. A l’Université d’Abomey-Calavi (Uac), des étudiants font de plus en plus face à de grosses difficultés pour obtenir des actes académiques essentiels dont les relevés de notes, les attestations de réussite, les diplômes, etc. Ce retard ou cette absence de délivrance de documents entrave non seulement leur parcours universitaire, mais menace aussi leur avenir professionnel. Malgré une hausse du ton du désormais ex-recteur Félicien Avlessi qui a officiellement averti les chefs d’entités en février 2024 à cause des retards persistants dans la délivrance des actes académiques, rien n’a semblé bouger à la Fllac. Bien au contraire, les retards ont pris de l’ampleur et sont devenus très récurrents. Ils peuvent durer des semaines voire des mois selon les cas. Certains étudiants disent même que le retrait des actes académiques est une question de chance. « Un ami et moi avions fait nos demandes de relevés depuis mars 2025. Deux semaines après, il a reçu un message l’invitant à passer retirer ses actes. A ce jour, je n’ai toujours pas été satisfaits malgré toutes mes relances », a confié un autre étudiant. Les causes des retards sont multiples et à divers niveaux.
Le manque de dématérialisation, l’une des raisons
Pour les acteurs, le retard observé dans le retrait des actes académiques s’explique par plusieurs facteurs dont la non-dématérialisation ou l’inefficacité des services administratifs. Bien que l’Université d’Abomey-Calavi ait engagé certaines démarches pour moderniser les inscriptions qui se font désormais en ligne, la délivrance des actes est toujours prisonnière de procédures manuelles ou de lenteurs administratives. Certains évoquent aussi la complexité des procédures administratives comme il est de coutume au Bénin avec une absence de clarté et le déficit d’effectifs dans les services de scolarité pour traiter le volume de demandes. Le changement fréquent des équipes dans les services de la scolarité, le manque de responsabilité ou suivi dans les chaînes de décision et l’absence de la digitalisation complète du processus de délivrance des actes sont d’autres raisons. A tout cela s’ajoute la fermeture fréquente des portes du service de la scolarité pour des raisons de congés du personnel ou de nécessités de service sans oublier la nonchalance des personnes devant servir d’interface entre le service et les étudiants. Les étudiants se plaignent de ne pas toujours savoir à quelle étape se trouve leur dossier, ou quelles pièces manquent. Le secret administratif ou le manque de communication complique le suivi de la demande.
De lourdes conséquences
Les retards observés dans la délivrance des actes académiques ne manquent pas d’avoir des répercussions de divers ordres dont universitaire et professionnel sur les étudiants. Certains accusent de retard pour s’inscrire dans des programmes de master ou pour des universités à l’étranger. D’autres font face à des difficultés à postuler à des emplois, stages ou concours qui exigent la production de diplômes ou attestations. Cela cause des frustrations et le découragement chez ceux qui voient leur avenir au ralenti à cause d’un document administratif.Pour les étudiants, notamment ceux qui sont en fin de cycle, mémorants, ou qui doivent remettre un dossier pour une soutenance ou pour une validation d’études, ils sont les grosses victimes de ces retards. À la Fllac, les règles ont changé après la suppression des soutenances au profit des rapports de recherche. Toutefois, les relevés de notes figurent parmi les pièces constitutives des dossiers à déposer.
Des solutions concrètes
La dématérialisation du processus avec la mise en place d’une plateforme en ligne où chaque étudiant peut déposer sa demande, suivre le traitement, voir les pièces manquantes, obtenir le document final sous format numérique certifié comme c’est le cas avec les pièces biométriques nominatives grâce à l’Agence Nationale d’Indentification des Personnes (Anip) est la solution la mieux souhaitée par les étudiants. Il est, par ailleurs, recommandé pour plus d’efficacité de fixer des délais maximums pour la délivrance des actes académiques, instituer des services de contrôle ou de médiation chargés de veiller au respect des délais, de traiter les réclamations des étudiants et de sanctionner les agents du service de la scolarité auteurs des retards non justifiés. « Les autorités peuvent prendre des dispositions pour nous informer en temps réel des avancées, des changements de procédures, des délais réels et des pièces manquantes », a indiqué un étudiant. Pour finir, il faut une mise à disposition des ressources matérielles et humaines adéquates.
Mohamed Yèkini