Vendredi 20 décembre 2024 devant les députés au Palais des Gouverneurs à Porto-Novo, le Chef de l’Etat du Bénin, Patrice Talon a prononcé son discours sur l’état de la Nation.
DEUXIEME PARTIE : LA CHERTE DE LA VIE ET LE FAIBLE POUVOIR D’ACHAT.
1- « La cherté de la vie et le faible pouvoir d’achat du plus grand nombre d’entre nous, demeurent eux aussi pour moi, un point d’insatisfaction et de peine ».
Président, je voudrais bien vous croire, mais vous m’avez arraché tout argument. Comment la vie ne va pas être chère et le pouvoir d’achat faible quand la seule chose que vous savez mieux faire, c’est de voir vos administrés souffrir.
Quand les bonnes dames sont chassées des abords des voies où elles mènent de petits commerces pour nourrir leurs familles, quand vous avez liquidé et pris dans votre patrimoine personnel toutes les sociétés d’Etat : Carder, Sonapra, Ons, Caia, Onasa, la Sonacop, la Sobemap, le Cncb, le Libercom, etc ; quand vous avez détruit les hommes d’affaires qui employaient des milliers de béninois pour vous occuper avec votre clan de leur business ; quand vous envoyez à la retraite d’office des milliers de policiers et militaires ; quand vous rendez précaire l’emploi par une loi de main d’œuvre esclavagiste ; quand vous êtes seul propriétaire de tous les secteurs vitaux où vous êtes libre de fixer les prix de vente et d’achat ; quand vos sociétés sont exemptées de taxes et impôts alors que les petits travailleurs sont assujettis à toutes sortes d’impôts, taxes et redevances ; quand vous faites venir vos amis étrangers occuper les postes importants et stratégiques du pays avec des millions de salaire par mois alors que les nationaux sont privés de primes et accessoires ; quand les AME ne sont pas reversés et gagnent des salaires de misère avec 26 voire 30 heures de cours par semaine ; quand vous pompez toutes les ressources publiques avec le PVI ; quand vos sociétés écrans gagnent tous les marchés publics dans une opacité totale ; quand les projets les mieux financés du secteur de la santé sont pilotés par la Fondation de votre épouse ; quand les artistes nationaux talentueux sont laissés au profit des artistes étrangers que vous payez à coup de dizaines de millions ; quand les producteurs s’endettent pour produire des denrées dont vous êtes seul bénéficiaire en gagnant sur leur dos des dizaines de milliards ; quand vous expropriez les béninois de leur terre pour vous-mêmes, vos collaborateurs et amis ; quand vous prenez les domaines de l’Etat pour vos sociétés etc. ; pourquoi alors s’étonner de la misère du peuple qui est le dernier de vos soucis ?
Pourquoi s’étonner de la vie chère quand par un coup de tête, vous fermez les frontières du Bénin d’avec le Niger, privant des milliers de dockers, de transitaires et autres acteurs portuaires de travail et de ressources les plongeant dans la détresse sociale ?
2- « Est-il réaliste que, venant de si loin, nous soyons déjà tous, satisfaits de tout ? »
Monsieur le Président, de quel horizon parlez-vous ? « C’est l’hôpital qui se moque de la charité ».
– Qui est-ce qui vous a conseillé de supprimer l’Onasa qui permettait aux béninois d’acheter les produits de grande consommation à prix réduits et subventionnés en période de soudure ?
– Qui est-ce qui vous a conseillé de supprimer la gratuité de la prise en charge des dialysés par l’Etat ?
– Vous êtes un hyper libéral qui n’est préoccupé que par le profit. Vous avez volontairement choisi de faire dos au social et de clochardiser votre population.
Je ne suis pas un adepte de l’amnésie Monsieur le Président.
Venant de si loin ! Parlons un peu de la rémunération des fonctionnaires et travailleurs à travers une étude comparative de l’augmentation des salaires sous le régime précédent et le vôtre Monsieur le Président Patrice Talon.
Le régime de la rupture a pour arme de gouvernance le mensonge, oubliant que les investisseurs sérieux et toute personne curieuse pourrait avoir accès aux informations crédibles sans se déplacer grâce aux nouvelles technologies de la communication.
Sous le Président Boni YAYI, les travailleurs béninois ont eu droit, plusieurs fois à des augmentations substantielles de salaire. En 10 ans de gouvernance, certains fonctionnaires ont vu leur salaire multiplié par plus de trois. Les enseignants et les professeurs d’université peuvent en témoigner comme les agents de santé et les agents d’autres corporations.
La plupart des enseignants qui étaient sans moyen de locomotion, ont acquis des voitures. Beaucoup ont troqué le « bohoumba » contre des costumes.
La majorité des fonctionnaires ont construit leur propre résidence et quitté la location.
A Porto-Novo par exemple, tout un quartier porte un nom expressif du bonheur retrouvé des enseignants sous le régime de Boni YAYI.
Le SMIG
Dans le souci de relever le niveau de vie des agents à faible revenus, trois actes fondamentaux ont été posés sous le régime YAYI :
o Par Décret N° 2007-453 du 02 octobre 2007 portant relèvement des salaires payés en dessous du montant du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) pour compter du 1er octobre 2007, le régime YAYI, un an et demi après son avènement a déjà pensé à l’amélioration des conditions de vie des travailleurs par le réajustement de leurs revenus :
• Pour compter du 1er octobre 2007, les agents de l’Etat payés en dessous du SMIG sont désormais payés au SMIG (Article 1er)
• Les agents de l’Etat payés jusque-là en dessous du SMIG ont reçu un complément de solde de manière que leurs salaires bruts indiciaires ne soient pas inférieurs au montant du SMIG (Article 2)
o En fin mars 2019, soit deux ans après l’arrivée au pouvoir de Boni YAYI, le SMIG est passé de 27.500 FCFA à 31.625 FCFA, soit une augmentation de 15%.
o Le jeudi 17 avril 2014, le communiqué du Conseil des ministres a annoncé l’adoption par les membres du gouvernement du décret portant relèvement du salaire minimum.
Ainsi, par Décret N° 2014-292 du 24 avril 2014 portant relèvement du Salaire minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG), le salaire minimum est relevé de 26,48% passant de 31.625 FCFA à 40.000 FCFA à compter du 1er mai 2014.
Il résulte de ces augmentations successives que le SMIG sous le régime de YAYI Boni est passé de 27.500 FCFA à 40.000 FCFA soit une augmentation de 45,45% largement au-dessus de 30% d’augmentation sous votre présidence après 8 ans de pouvoir.
Sous le régime de la rupture du Président Patrice TALON,
contrairement aux déclarations mensongères du Ministre des finances Romuald WADAGNI au Brésil « En décembre 2023, le Bénin a procédé à l’augmentation la plus forte de toute notre histoire. Les salaires les plus bas ont connu une augmentation de plus de 40% », l’augmentation du SMIG sous le Président Patrice TALON n’a été que de 30% faisant passer le SMIG de 40.000FCFA à 52.000FCFA à compter du 1er janvier 2023.
L’annonce a été faite par le gouvernement à l’issue du Conseil des ministres du mercredi 7 décembre 2022.
C’est ainsi que le Décret N°2022-692 du 07 décembre 2022 portant relèvement du SMIG a été pris.
« Le Salaire minimum interprofessionnel garanti est relevé de quarante mille (40.000) francs CFA à cinquante-deux mille (52.000) francs CFA, soit une augmentation de 30% à compter du 1er janvier 2023. » (Article 1er dudit décret signé pourtant du Ministre de l’Economie et des Finances, Ministre d’Etat, Romuald WADAGNI).
Augmentation de salaire dans la fonction publique.
Ici, je prends l’hypothèse que la déclaration du ministre des Finances WADAGNI au Brésil se rapportait à l’augmentation de salaire au profit des fonctionnaires en général et non spécifiquement au SMIG.
Si tel est le cas, le Ministre a dit des contre-vérités : les salaires sous le Président Patrice TALON n’ont pas connu une augmentation de plus de 40%. Evitons une fois de bon les amalgames.
En effet, la seule augmentation de salaire dont ont bénéficié les agents de l’Etat sous votre régime, monsieur le Président Patrice TALON est de 3%. Ladite augmentation a été consacrée par le Décret N° 2022-700 du 07 décembre 2022 portant revalorisation du point indiciaire de 3% pour compter du 1er décembre 2022.
Par ailleurs, par Décret N° 2022-701 du 07 décembre 2022 portant institution de sursalaire au profit des agents de l’Etat pour compter du 1er décembre 2022, votre gouvernement a institué une forme de prime dénommée sursalaire. Ce sursalaire n’est pas à confondre avec une augmentation traditionnelle de salaire par valorisation du point d’indice puisque ce sursalaire n’accompagne pas les agents à la retraite. Il pourrait même être supprimé en cas de difficultés accentuées de trésorerie du moment où les syndicats sont réduits impuissants par la quasi-suppression du droit de grève, arme redoutable dont ils se servaient contre les régimes précédents parce que manipulés pour la plupart par vos soins.
Par une note circulaire conjointe signée du ministre d’Etat chargé des finances et du ministre de la Décentralisation, votre gouvernement a autorisé l’application de ces décrets au profit des agents des collectivités territoriales décentralisées à compter du 1er décembre 2022.
En termes clairs, ce sursalaire est la restauration partielle des nombreuses primes supprimées aux agents de l’Etat par le régime de la rupture. A ce titre, l’article 2 dudit décret est explicite : « L’octroi du sursalaire est détaché du grade et de la fonction de l’agent de l’Etat. Il est basé sur le revenu net de l’agent. »
Pour mémoire, le régime de la rupture, à son avènement, a supprimé la quasi-totalité des primes et indemnités dont bénéficiaient les agents de l’Etat sous le régime de YAYI Boni.
Au total, l’affirmation du Ministre WADAGNI selon laquelle, les agents de l’Etat ont connu une augmentation de salaire de plus de 40% est totalement fausse.
J’espère que les centrales syndicales ne vont pas continuer à se rendre complices par leur silence prolongé de ce mensonge que vous avez amplifié le vendredi 20 décembre 2024 devant les députés à l’Assemblée nationale.
Est-ce que le gouvernement de la rupture a encore une conscience lorsqu’il s’acharne à se comparer à chaque occasion au régime de YAYI ? Sans fausse modestie, c’est le jour et la nuit.
En matière de l’amélioration des conditions de vie des agents de l’Etat, tous les fonctionnaires en général, en service ou à la retraite ont en mémoire les différentes augmentations de salaire reçues sous le régime YAYI et qui les ont accompagnés à la retraite.
Globalement les taux d’augmentation de salaire sous le régime YAYI se présentent comme suit :
– Les personnels non enseignant de l’Etat : 43% ;
– Les enseignants du primaire et du secondaire : 68% ;
– Les maîtres-assistants des universités : 165% ;
– Les maîtres de conférences des universités : 198% ;
– Les professeurs titulaires des universités : 218%.
DJENONTIN-AGOSSOU Valentin
Ancien Ministre,
Député élu, 7ème législature.